mardi 24 novembre 2009

Silence Hôpital

Sur son chariot, Rosiane attendait. Elle ne savait pas depuis combien de temps. Elle ne se souvenait que des couloirs interminables, des néons agressifs. Puis elle était tombée en profonde léthargie dont elle se réveillait en même temps que la douleur. De la salle émanaient cris et vagissements des malades en réveil. Elle appela en vain. Rien en se passa. Elle sombra à nouveau.
De notre côté, rien. A croire que le téléphone à Lariboisière avait été coupé pour factures non payées. Sur place personne. On a traversé dans le noir la cour carrée pour descendre au 3ème sous sols. La lumière blafarde nous faisait des gueules de pas biens portants. Des murs jaune sale. Quatre ascenseurs pour le service et une porte coulissante interdite au public. Le bloc. On sonne. Rien. Lariboisière emploie des sourds et muets. J’essaie le langage des signes. Rien. Sourds, muets, aveugles. Avec les boules et une furieuse envie de les enguirlander, bientôt Noël, je me suis pensé. Nous regardions le bloc comme une vitrine de Noël. Mais le spectacle s’est révélé vite lassant. Alors on a re-ressonné. Une aide soignante, récemment mutée de l’hôpital de la Grotte à Lourdes, nous a ouvert. Il y avait bien une Rosiane dans le parking des opérés. On en a pas su plus jusqu’à l’arrivée d’un anesthésiste qui nous a endormi.
Sur son chariot, Rosiane attendait. Elle ne savait plus depuis combien de temps. Elle ne se souvenait que des couloirs interminables, des néons agressifs et de cette douleur de plus en plus insupportable dans le ventre. Elle appela. On lui cherchait une place. Patientez. Et pour la douleur ? Combien de 1 à 10 ? Rosiane ne savait pas. 20 ! Patientez. Elle patienta. Et rien en se passa. Elle continua à souffrir en silence.
Dans l’atmosphère feutrée du couloir vide et interminable du service de chirurgie viscérale , le silence est pesant. Avant de balancer le concept de son émission, M6 et L’équipe de D&Co avec Valérie Damidot s’est entraînée à l’Hôpital Lariboisière. Les murs sont bleu. Rosiane est jaune. Ses filles sont verte. C’est joli mais faut aimer. Faut les comprendre aussi les filles à Rosiane. Opérée de la veille et toujours en l’attente d’une place, d’un anti-douleur et d’un pronostic. Il y a eu des mots. On a frôlé l’hémorragie de l’interne. Entubée sur son chariot, même Rosiane s’en est mêlée : « Pas de moyen ! m’en fous ! Z’avez qu’à pas voter Sarkozy ! Moi, j’ai pas voté Sarko et j’ai mal ! »
Du coup ça a rassuré tout le monde, enfin surtout ses filles car l’interne n’en menait pas large. Déjà deux sur le râble, alors avec la mère en sus, c’était pas gagné. Il a fait venir du renfort et la Rosiane les cheveux dans le vent à 12o km/h avec sa perf anti-douleur pour gagner enfin sa chambre. Ah les femmes, quand même !

Aucun commentaire: