mercredi 31 mars 2010

Une place au soleil.

"La direction de Continental, le manufacturier de pneumatiques allemand, vient de proposer à des ex-salariés du site de Clairoix (Oise) fermé il y a un an et où travaillaient 1 120 personnes un emploi… en Tunisie. 600 personnes licenciées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ont reçu cette offre hier pour 60 postes à pourvoir. « C’est une pure provocation et je n’arrive pas à comprendre qu’on puisse nous proposer un truc pareil », lance Bernard Lens, 57 ans, en brandissant la lettre recommandée. Un courrier qui lui propose de postuler à un emploi d’opérateur de production dans une filiale du manufacturier de pneus baptisée Continental Automotive située à Bizerte en Tunisie. Emploi rémunéré 260 dinars, soit 137 € sur treize mois et régi par la convention collective tunisienne. La direction de Continental se retranche derrière la loi. « Il s’agit d’une obligation légale et en aucun cas d’une provocation. Ce poste en interne correspond aux qualifications des ex-salariés de Clairoix et la langue parlée est le français, ce qui nous oblige à le proposer. Une entreprise a été condamnée pour ne pas avoir respecté ces obligations », indiquait hier un porte parole du groupe allemand, qui reconnaît implicitement que, « si cette rémunération est conforme aux standards de ce pays, elle est très inférieure aux minima en vigueur au sein de Continental France».

Patrick Modiano 3/6

mardi 30 mars 2010

Piqure de rappel

Au pays du Looser magnifique.

"Dans « Incidences », l'écrivain raconte les frasques sexuelles d'un professeur de littérature appliquée. Ames prudes, s'abstenir ! Marc, 53 ans, rentre chez lui au volant de sa Fiat 500 qui pétarade dans les lacets (problème de pot). A sa droite, une jeune étudiante aussi bourrée que lui, Barbara. Marc donne des cours de creative writing à l'université. Et Barbara n'est pas la première fille à rêver d'être Faulkner, ni à obtenir de Marc, au cours d'une soirée agréable, qu'il lui donne un petit coup de main dans ce domaine. Marc habite avec sa soeur Marianne, près de la frontière suisse. Marc et Marianne ont été, semble-t-il, martyrisés par leurs parents quand ils étaient petits. Djian reste flou sur ce passé d'horreur, évoquant seulement quelques séances atroces. Toujours est-il que le frère et la soeur ne s'en sont sortis que parce qu'ils étaient deux : se consolant l'un l'autre, se caressant, faisant l'amour à l'occasion pour ne former plus qu'un. Depuis combien d'années n'ont-ils plus couché ensemble ? A en juger par la jalousie qui les anime toujours, on jurerait que le feu, entre eux, n'a pas fini de couver.
Mais Marc est un charmeur. Elles tombent toutes, à ce qu'il paraît. Comme cette Barbara qu'il ramène chez lui à pas d'heure, ivre morte et probablement incapable d'accomplir quelque galipette que ce soit. Ou comme cette Annie qui, avec sa poitrine affolante, se coltinerait bien tout Brecht si elle pouvait finir au lit avec lui. Marc y voit comme un bonus, mais prend garde de ne pas éveiller les soupçons de Richard Olso, le chef du département de français, qui verrait d'un sale oeil qu'un prof soit pris la main dans le slip d'une étudiante. C'est alors que Myriam, la belle-mère de Barbara (du moins le croit-il encore), entre en scène. Les voici tous les deux transformés en bombes H du désir humain, créatures littéralement possédées l'une par l'autre, se sautant dessus dans des positions déconseillées par tous les ostéopathes de la Terre, parce qu'effectuées dans des endroits impossibles (la Fiat 500, donc, ou les sanitaires du campus).
On s'en voudrait de trahir tous les petits secrets du dernier Djian : il vous suffit de savoir que ce roman à la fois sombre et d'une drôlerie irrésistible est votre dernière tequila. Il réveillerait un mort. Mais qui peut en douter ? Dans tous les compartiments de la fiction, et notamment dans le style, ses images, ses lenteurs, la puissance que l'auteur a sous le capot, comme un impressionnant bolide dont il préférerait faire rugir la seconde plutôt que de laisser partir la bête, Djian n'a pas son pareil."
« Incidences » par Philippe Djian Gallimard, 230 p., 17,90 euros. ..

dimanche 28 mars 2010

Patrick Modiano 1/6

«Depuis quelque temps, Bosmans pensait à certains épisodes de sa jeunesse, des épisodes sans suite, coupés net, des visages sans noms, des rencontres fugitives. Tout cela appartenait à un passé lointain, mais comme ces courtes séquences n’étaient pas liées au reste de sa vie, elles demeuraient en suspens, dans un présent éternel.»
"Dès ces premières lignes placées sous l’égide de la fuite du temps, le nouveau roman de Patrick Modiano "l'horizon" manifeste son appartenance à une oeuvre sérielle, reprenant à la manière d’une ritournelle les mêmes thèmes, interrogations, types de personnages - avec un charme toujours renouvelé. Chaque roman de Modiano est comme un puzzle, dont chaque élément est une bribe du passé. Celui-ci n’échappe pas à la règle. Il ne se passe presque rien L’atmosphère en est toujours aussi ouatée, les allures hésitantes, l’univers flottant, les pistes brouillées. Pourtant, chaque fois, on se laisse prendre. Plus de quarante ans et près de trente livres que cela dure."

vendredi 26 mars 2010

Grisgris et Apolline dans le Bocal à Reims

J'ai déjà évoqué les Grisgris de Sophie, blog que je suis régulièrement avec beaucoup d'intérêt. Le hasard de l'actualité veut que prochainement à Reims au restaurant Le Bocal, dans la poissonnerie des Halles, 27 rue de Mars, face aux halles Boulingrin, Sophie Lepetit et sa fille Apolline exposeront leurs créations du 30 mars au 1er juin 2010. Pour mettre en lumière cette belle collaboration artistique et filiale, j'emprunte à Anne Paulerville son très beau texte.
Les « Grigris de Sophie », c’est un jardin de tissu où fleurissent des pastilles colorées. Une petite entreprise de couture chamarrée contre la crise et la grisaille. Légèrement amarrés sur la voilure sombre d’un manteau ou d’un sac, les fils à nœuds de laine bouillie ou de feutrine déroulent les circonvolutions de leurs couleurs pour accrocher sur l’horizon souvent bien terne des vêtures quotidiennes des astres chatoyants à l’éclat velouté. Et le prêt-à-porter se fait prêt à partir pour quelque rêverie polychrome qui égaye l’œil.On imagine un atelier exubérant comme un potager d’où surgiraient d’improbables coloquintes de textile, ciselées par des doigts de fée minutieux et imaginatifs.Sophie Lepetit travaille les textures comme les couleurs ou les formes, et les grigris appellent autant le toucher que le regard. Impossible de résister à l’envie de caresser les pétales de feutrine d’une main distraite ou attentive, de faire rouler les perles sous la pulpe des doigts.Les grigris portent bien leur nom : bien que pas gris pour deux sous, ils ont tout du porte-bonheur. De petits bonheurs portatifs, à promener avec soi, à tâter comme on touche du bois pour conjurer un courant fugitif d’inquiétude passagère ; et repartir, après avoir butiné un peu de gaieté, comme l’abeille qui s’envole, sereine, une fois sa moisson faite, et s’affaire à d’autres tâches.Chaque grigris est unique, papillon multicolore né de la rencontre éphémère entre un bouton et un ovale de laine bouillie, une plume et un ruban de satin, une inspiration et quelques centimètres d’étoffe ; un regard, une histoire et des matières.
Dans cette collection particulière, au cœur de chaque fleur brodée par la maman, éclot une image née de l’imagination de sa fille. Un regard qui surgit, entouré par son doux nid de couleurs chaudes. Ou encore le portrait de la grand-mère de Sophie, couturière, qui préside aux heureuses destinées de ces trois artistes. Une transmission de fil en aiguille à travers les générations, dans une version lumineuse des trois Parques antiques. (La première file, la seconde déroule, et la troisième coupe.) Mais Apolline, l’arrière-petite-fille, ne coupe pas court à cette lignée d’inspiration. Bien au contraire : au centre de ces enluminures textiles, se blottit un dessin ou une photo de la jeune fille. Autoportraits d’un regard attentif aux palpitations de paysages en miniature, images de splendeurs minuscules : une maison se reflétant entière dans la sphère nacrée d’une goutte d’eau ; un visage de bronze baigné de lumière par la pluie, la danse d’un brin d’herbe, le tricot de fer d’un grillage habillant l’horizon,…Le don de voir le sublime dans l’infime.Et la matière se fait conteuse : une trace patinée pour chaque âge, le temps qui passe raconté par la rouille, et l’histoire d’un amour de famille partagé pour le beau et sa fragilité, sertie comme le dessin d’une constellation dans l’album épars de ces lettrines de feutrine.
Anne Paulerville
A ne pas râter, donc.....qu'on se le dise.
Les Grigris de Sophie et les photos d'Apolline du 30 mars au 1er juin, restaurant le Bocal, Reims.

jeudi 25 mars 2010

Il neige.


« Tiens, il neige ! » J’ai levé les yeux et n’ai rien vu. « Comment que ça se fait ? – Je sais pas. Essaye une autre. – il neige aussi. – Et l’autre. – pareil. – Dis-donc tu y a encore touché ! » Au ton de la voix, je me suis douté que le commentaire m’étais destiné. « Touché à quoi ? j’ai dit. – Ben, la télé. – La télé ? – Oui, la télé. – Je n’y ai pas touché. - Alors pourquoi il neige. –Tiens, c’est vrai ». j’ai dit pour rien dire. Nous nous sommes regroupés autour du téléviseur. J’ai lorgné les télécommandes. T’es sûr d’avoir pris la bonne ? – J’ai pris celle de d’habitude. – Comme tu te trompes d’habitude, je ne vois pas pourquoi tu ne serais pas gourée cette fois-ci. - Ben vas-y toi, puisque t’es si malin, m’as t-on dit en me tendant la télécommande SFR. – Je m’en doutais ! » J’empoignais la télécommande d’une main et de l’autre la Free. Je jouais des pouces en vain. Il neigeait toujours. J’ai lorgné la télécommande du téléviseur. J’ai lorgné la télécommande du lecteur de DVD. D’après la publicité, ayant Free, j’avais tout compris, mais avais dû manquer la clause du contrat relative aux intempéries. « Et si on attendait le petit ! j’ai suggéré. – Et mon feuilleton ? Il sera rentré pour mon feuilleton ? – Oh ! tu sais, avec lui, on ne peux pas savoir. – Même pour sa grand-mère ? » Nous nous sommes contentés de lever les yeux au ciel et regarder tomber la neige. Elle est tombée un moment. Nous étions transis de bêtise lorsque le petit est arrivé dans un climat glacé. « Vous faites, quoi ? – On regarde la télé. » Il a éclaté de rire. J’ai aboyé quelques consignes et il s’est glissé derrière le téléviseur effectuer les branchements appropriés. « C’est bien simple depuis qu’il sont venus installer la fibre optique plus rien ne fonctionne. – De toutes les façons vous ne regardez jamais les chaînes de Free. Alors, passez directement par le câble et SFR. Et ça change quoi ? – Vous aurez les chaînes en numérique. – Si je peux avoir mon feuilleton même comme avant….- En analogique ? – Comme avant. – En analogique. Avec SFR tu l’auras en numérique. – Ce que je veux, c’est mon feuilleton. – Alors cette télécommande, précisa le petit en nous désignant celle du téléviseur, ne sert que pour augmenter éventuellement la densité du son du téléviseur. La Free ne sert à rien, juste pour internet et lé téléphone. – Si tu crois que je vais regarder mon feuilleton par le téléphone - Celle du lecteur DVD ne sert que pour la lecture d’un DVD. – Tu nous prends pour des cons ? – Non, mais je précise, des fois que… - Des fois qu’on serait des vieux cons ! – Et celle-ci sert à changer les chaînes. – La SFR ? – Oui, la SFR. – Et pourquoi la SFR ? – Parce-que. – Ah, bon. – Et pour mon feuilleton ? – Et voilà, mamie ! » Miracle de la technologie, la chaîne fut trouvée, le son réglé et nos gueules fermées question de laisser l’ancêtre se repaître de son émission favorite.
A la fin du feuilleton, le petit est revenu à la charge : "Vous prenez la télécommande de la télévision. Vous voyez le petit symbole, là, en haut ? Ben, quand vous appuyez dessus, vous choisissez EXT 1 et vous aurez les chaînes en numérique. Simple non ?"
Le lendemain, en entrant, j'ai senti illico comme un climat de tension dans la maison.
"Tu regardes pas la télé ?" j'ai demandé. -Je ne sais pas faire marcher votre truc." J'ai haussé les épaules et appuyé sur l'interrupteur. "Tu y a touché ? - Puisque je te dis que j'ai touché à rien." J'ai baissé les yeux et lorgné la télécommande que j'avais en main. Je me suis interrogé un temps avant de comprendre que je n'avais pas pris la bonne. "Dis, tu te rappelles le symbole ? - Le symbole de quoi ? - Rien" j'ai fait un rien abattu devant la technologie. Je me suis effondré sur le canapé avec un livre. La météo ne s'était pas amélioré. Il neigeait toujours. "Il est rentré, Hugo ? j'ai demandé. - Non. - Il est ici ce soir ? - Je crois. - Il rentre à quelle heure. - Avant mon feuilleton." J'ai enfilé mon anorak.

mercredi 24 mars 2010

Pieranunzi plays Scarlatti

En évoquant, il y a quelque temps, l'écoute du travail de Lou au piano sur son blog, il y était notamment question des Sonates de Domenico Scarlatti. A ce propos, le pianiste et jazzman Enrico Pieranunzi "renouvelle en un disque éblouissant l’interprétation des sonates de Domenico Scarlatti en articulant avec une rare intelligence les rapports entre le jazz et la musique classique.Ce disque est un événement. À double titre : d’une part par suite de l’excellence, de la haute exigence, de la maestria de la musique et de son interprétation, d’autre part par l’intelligence hors du commun présidant à sa conception et à sa mise en œuvre. On connaît les interprétations désormais historiques, entre autres, de Marcelle Meyer, Vladimir Horowitz, Robert Casadesus. Disons-le tout net : Enrico Pieranunzi se situe à cette altitude par la vivacité de son phrasé, la netteté impeccable de son articulation et son impérieuse motricité.Les Sonates K. 18, K. 51 et K. 260 de Domenico Scarlatti ne font d’ailleurs l’objet d’aucune improvisation consécutive : « Ce sont des pièces musicales d’une telle intensité et d’une telle solidité structurelle que je n’ai pas ressenties qu’il y a quoi que ce soit à ajouter », se justifie-t-il. Car il joue réellement les Sonates, qui sous ses doigts sonnent avec une intensité poétique qui leur manque parfois. Voyez la K. 208, comment s’interpénètre Scarlatti et sa propre improvisation en un chant bouleversant de grâce. Détailler les merveilles de ce disque du simple point de vue classique serait trop long. C’est assez dire que l’écoute comparée avec les légendes citées plus haut réserverait sans doute des surprises."

mardi 23 mars 2010

L'illettré.

Lorsque que j’arrivais à hauteur du type, celui-ci fit subitement volte face : « Pardon, monsieur, la rue de Maubeuge, s’il vous plait ? » La tête ailleurs, je savais qu’elle se situait effectivement dans le quartier mais ne parvenais pas à la définir correctement d’un point de vue géographique. « Je suis vraiment désolé, mais je ne sais pas. » dis-je au type les bras chargés de bouquins. Je m’apprêtais à poursuivre ma route lorsqu’il me fourra dans la main deux des livres de sa pile. « Vous avez été fort aimable de me répondre et permettez-moi, à l’occasion du Salon du livre de Paris de vous offrir ces deux ouvrages. » Les livres à la main, je restais dubitatif tandis que le type me jaugeait. « Vous êtes chercheur, enseignant ? » fit-il. Ma tenue vestimentaire lui avait sans doute suggéré ses propositions diverses. « Professeur de lettres. » répondis-je. Cela m’était venu à l’esprit et à mon tour, je lorgnais mon interlocuteur. Il paraissait ravi de ma réponse. « Je ne me suis pas trompé, vous en avez l’allure. Vous êtes donc au courant. Je n’ai pas besoin de vous parler du Salon du livre de Paris. Permettez-moi donc seulement de vous offrir ces deux livres. – Eh bien écoutez, merci. » J’allais m’éclipser quand le type me retint d'une main. « Mais si vous pouviez donner ce que vous voulez à l’Associations des jeunes Ecrivains. » Nous y voilà, me dis-je. « Les jeunes d’aujourd’hui, n’ont rien d’autres à faire que d’écrire au lieu de travailler ? » Stupéfait, le type perdit son sourire. Je profitais de cet instant d’étonnement pour lui rendre ses deux livres. « Et puis tenez, je vous rends votre cadeau. D’ailleurs, je n'en ai aucunement besoin, je ne sais pas lire. – Pardon ! s’égosilla le type. Mais vous m’avez dit être professeur de lettres ! – Et alors ! Qu’est-ce que ça change ? Je vous rassure tout de suite, mes élèves ne savent pas lire non plus. – Vous vous foutez de ma gueule ? » Je le laissais sur le trottoir avec sa pile et ajoutais avant de partir « C’est de bonne guerre, non ? Vous avez commencé le premier. »

lundi 22 mars 2010

The Letters : The Box Tops (1967)

Alex Chilton (Photo: Philippe Brizard - Source: Wikimedia Commons)
Le 17 mars, Alex Chilton nous a quittés, foudroyé par une crise cardiaque, à 59 ans. Ce timbre rauque, puissant, légèrement granuleux, modèle de voix soul blanche qui égrenait la boucle irrésistible de The Letter, tube mondial des Box Tops en 1967, était celui de Chilton, alors à peine âgé de 16 ans. Chilton, enfant du rock'n'roll et de la soul les plus authentiques puisque natif de Memphis, s'accommodait mal de son statut d'idole des jeunes. Seul importait pour lui son idéal musical, un Graal qu'il partageait avec son frère (ennemi ?) de son Chris Bell. Au début des années 70, sous le nom de Big Star, ils créent une musique de rêve, la power pop, à contre-courant des modes, qui mariait l'essence mélodique et instrumentale des Beatles, des Who et des Byrds avec l'intensité brute de la soul originelle. Big Star fut adulé par les critiques, ignoré du public. Parce que les disques du groupe, mal distribués, étaient introuvables. Parce que la musique, elle-même, trop gracieuse, n'était pas de son temps. Parce que les musiciens, trop fragiles, trop torturés, n'avaient pas la carrure de rock stars. Toujours est-il que l'échec du premier album de Big Star ne servit qu'à nourrir les désaccords esthétiques entre Bell et Chilton et le désarroi qui sous-tendait les chansons faussement radieuses du groupe. Artiste culte par excellence, Alex Chilton, tout en menant une carrière solo des plus chaotiques et épisodiques, verra son étoile briller toujours un peu plus d'année en année sans qu'on ne sache vraiment si ça le réjouissait ou l'indifférait. En tout cas, il tournait régulièrement avec un Big Star ressuscité, alors que le groupe, fin 2009, s'est vu dignement célébrer par un formidable coffret couvrant toute sa brève mais extraordinaire épopée.

dimanche 21 mars 2010

Le dimanche réunionnais.

"Ca y'est retour du dimanche réunionnais! Après 15 jours d'alerte fortes pluies, orages, cyclone etc le soleil est de retour et ça fait du bien. Donc pour fêter ça, on s'est fait un bon dimanche a la cool. Au programme grasse mat, ptit déj, terrasse, départ pour St Gilles plage des brisants ou on a passé l'après midi entre le sable chaud et l'Océan Indien chaud lui aussi. Les enfants ont fait du morey tout le temps ou presque, et quand on leur a dit: "bon, on y va" ils ont fait la gueule! Alors après 5 secondes de réflexion on a finalement dit:"bon ok, on va au resto!" Nous avons donc fini cette journée par un bon carri crevette pour Éric et moi et les mioches par un croque monsieur salade arrosé d'une dame blanche pour le dessert, le tout en face de la vague de St Gilles, ça mem mem!Bon c'est sur on a pas une vie facile mais c'est pas tous les jours dimanche non plus!Aller les ptits zoreille,bon fin dimanche a zot nou retrouve bientot. biz "
Déborah, Eric et les mioches.

samedi 20 mars 2010

C'est le printemps !

Sacré géranium, Tu sens bon la terre, Et toi aussi l'anémone, Tulipe je te préfére, Puis de toute façon vous sentez toutes bon, Vous êtes toutes belles mes demoiselles, Ah c'qu'on est bien dans ce jardin, Loin des engins hein ! Pas besoin de sous pour être bien, Pas besoin de vin pour être saoul. Les poules et le coq, Se content fleurette, C'est vrai qu'il est seul ce lapin, Je crois que ça l'embête, Dis, toi le chien, je ne te prive de rien,Remue donc ta queue fais moi tes beaux yeux, C'est vous les légumes enfin je présume, Vous n'êtes pas reconnaissables, Il vous faut dire qu'hiver vient de partir, Le temps est encore variable, Un coup d'arrosoir avant la tombée du soirUn coup de râteau autour des poireaux. Dick Annegarn Sacré Géranium par Dick Annegarn, Discorama 1974

vendredi 19 mars 2010

Casimir & Balthazar

Enfin des mesures chez France Bouldegom après la fameuse mode du suicide dénoncée par son ex PDG Casimir en fin d’année dernière. C’est donc normalement avec six mois de retard, que les 1900 salariés, gâtés pourris, de l’Ile aux Enfants quitteront le XIIIème arrondissement de Paris pour s’installer à Saint-Denis dans un bâtiment tout neuf nommé Balthazar, du nom du roi mage, celui qui apporta la myrrhe, utilisée dans l'antiquité par les Egyptiens pour l’embaumement des morts. Faut-il y voir un signe ou ferais-je du mauvais esprit ? En tout cas, j’ose espérer que ce déplacement géographique des plus sympathiques à proximité du Stade de France verra des locaux flambants neufs équipés de murs en mousse, de salles de jeux, d’espaces détente aux grands : « Maman, je t’aime » placardés sur les murs, question de créer un climat de confiance et éviter stress et névrose qui mènent à l’irrémédiable. Car l’irréparable guette toujours et encore les esprits fragiles de l’Ile aux Enfants. Déjà que Saint-Denis n’a pas une bonne réputation, entre ceux juchés à douze sur une mobylette empruntée, poursuivis et percutés par un véhicule de police emprunté également, les hooligans, si en plus les participants de l’Ile aux Enfant animent el quartier en se défenestrant derechef pour du Bougli Boulga pas frais à la cantoche ou une remontrance du chef de service où allons-nous ?
Eh bien, mine de rien, toutes ces conneries ont entrainées six mois de retard. Six mois de retard dans les travaux, vous vous rendez compte ? Un retard dû, à des travaux supplémentaires de rehaussement des rambardes de la passerelle qui traverse l’immeuble valant au Balthazar le surnom de « bâtiment antisuicide ». Elle est pas belle la vie. Vous voila rassurés. Moi aussi.
Au-delà de la conception de l’édifice, ce qui coince, c’est cette implantation à Saint-Denis, Les salariés s’inquiètent de la sécurité dans le quartier et de son accessibilité par les transports en commun. Voyez, déjà du mauvais esprit. « Les cadres finissent souvent assez tard, entre 18 heures et 22 heures. Certains craignent de se déplacer à ces heures-là dans les rues de Saint-Denis en costard cravate. Tu m'étonnes. En plus, comme il n’y a pas assez de places de stationnement dans le parking de l’immeuble et aux alentours, un certain nombre d’entre eux vont devoir prendre le RER B. Ils sont terrifiés par les dysfonctionnements de cette ligne ». Un RER pouvant en cacher un autre, pourvu que personne ne pète un câble. En tout cas, pour la direction désormais, toute disparition sera moins voyante dans le paysage urbain. On pourra toujours mettre cela sur le compte de la racaille et de l'insécurité et non plus sur les conditions de travail. C'est déjà ça.

jeudi 18 mars 2010

Un type bien.

Un honnête homme est mort. C’est ce qui s’est écrit dans l’ensemble de la presse. C’est ce qui s'est dit dans l’ensemble des médias. Ce ne fut pas toujours le cas. L’honnête homme à l’engagement militant refusait la révérence devant les puissants, l’hymne à la modernité mercantile. Attaché à la vie des gens simples il a souvent été mis à l’index par une ordinaire pourriture qui s’incline aujourd'hui devant le cadavre de l'honnête homme.
Dans les années soixante, il arrivait au type bien de passer à la radio. Moi, il me laissait indifférent. A l'époque, je pensais que la radio ne diffusait que des chanteurs de vieux. J’avais douze ans. On peut comprendre mon manque de discernement. Puis il y avait papa qui sifflait souvent les chansons du type bien en se rasant le week-end. Comme le type bien, papa a toujours été un compagnon de route. Ma mère soutenait le Général. Mon père restait fidèle au Parti des ouvriers.
Pour ma part, après un long passage à vide et des années sur les mers du monde, j’eus mes années militantes. Ferrat appartenait aux incontournables. Le chanteur engagé comme on disait à l’époque, souvent interdit de plateau télé, parfois invité à la sauvette parce qu’il était quand même populaire. C’est qu’on ne savait pas trop de quel contrepied il menaçait les critiques ni de quelle déclaration il était capable. Engagé du côté communiste, certes, lui dont le père juif avait péri en camp de concentration. « Compagnon de route » qui ne fut pourtant jamais encarté. Alors, il critiquait le PCF mais il se sentait solidaire : « Serrons les coudes camarades », fallait-il dire quand le Parti était attaqué et victime d’un « anticommunisme primaire », autre expression contemporaine. Les classiques de Ferrat sont des chansons qui dérangent et provoquent des débats sur les dérives staliniennes, la guerre du Vietnam, Mai 68, l'invasion de la Tchécoslovaquie par les Soviétiques... L'ORTF censure ce compagnon fidèle du PC ; il lui rend la pareille : on ne le verra plus à la télévision, ou rarement. Interprétées d'une voix forte et enveloppante, ses chansons rassemblent les opprimés, les méprisés, les exclus. « Je n'ai pas été un grand militant, mais j'ai participé à des actions pour défendre nos droits. Et j'ai appris aux jeunes qu'il fallait résister jusqu'à son dernier souffle. »
l’autre matin, en me rasant je sifflais entre mes dents « Ma môme » une des mes préférées. Celle que sifflait papa.

mercredi 17 mars 2010

La mort en direct


Libération a consacré dernièrement trois pages avec plusieurs encadrés à un documentaire en deux parties pour France 2, La zone extrême, sur les dangers de la téléréalité qui sera diffusé mercredi 17 mars. Le documentaire réalisé à cet effet s’appuie sur une expérience effectuée aux Etats-Unis, de 1960 à 1963, par le psychologue américain Stanley Milgram. Dans cette expérience, un individu était fermement invité par le responsable du laboratoire à infliger à une autre personne des secousses électriques de plus en plus fortes lorsque ce dernier fournissait de mauvaises réponses à ses questions. En réalité, aucun choc électrique n’était infligé, mais le cobaye l’ignorait. L’expérience avait montré que 62,5 % des sujets n’hésitaient pas à infliger la décharge maximum, 480 volts. Pour son documentaire, Christophe Nick a simplement transposé l’expérience de Milgram sous forme de jeu télévisé, dans l’esprit des émissions de téléréalité. Il s’agit de montrer que l’autorité d’un animateur de télévision peut pousser un candidat à commettre des actes qu’il croit être de torture. Le quotidien Libération, qui a pu suivre une partie du tournage, se montre dubitatif. Christophe Nick, par ailleurs auteur de la série documentaire Chroniques de la violence ordinaire, « use pour son documentaire anti-téléréalité des mêmes moyens contestables que ces émissions qui poussent leurs participants, volontaires, à explorer leurs bas-fonds », estime Paul Quinio dans son éditorial. « A la place du scientifique, une animatrice, Tania Young. Mais elle a la même fonction d’autorité et d’ailleurs quasiment les mêmes phrases types à prononcer que dans l’expérience de Milgram. Quand le candidat hésite à balancer le jus, elle dit, dans l’ordre, afin de le pousser à poursuivre : “Ne vous laissez pas impressionner, il faut continuer”, suivi de “Vous devez continuer, c’est la règle”, puis “Continuez à poser les questions, nous assumons toutes les responsabilités”, et enfin l’ultime “Vous ne pouvez pas empêcher Jean-Paul [en fait un comédien] de gagner, le public est d’accord”. Et l’animatrice d’en appeler aux vivats de la foule du studio… De la même façon, les hurlements de Jean-Paul, enregistrés, sont, à chaque nouvelle édition, rigoureusement identiques et interviennent strictement au même moment », décrit l’article de Libération.« Les données devront être dépiautées, affinées mais, en deux semaines de Zone Xtrême, selon les premières constatations, 80 % des candidats sont allés au bout, croyant infliger la décharge de 480 volts. Jean-Léon Beauvois [professeur de psychologie sociale] agite sa grosse barbe. Il n’en revient pas : « Je ne pensais pas que la télévision était une autorité légitime, comme l’est la science dans l’expérience de Milgram, je pensais que la télé ne pouvait pas prescrire. J’ai la preuve que j’avais tort. » Les journalistes de Libération Isabelle Roberts et Raphaël Garrigos estiment que « le spectacle vu des coulisses ou de la régie est perturbant: sur les cinq enregistrements auxquels nous avons assisté, seuls deux candidats ont désobéi et refusé d’aller au bout, dont un lâche un superbe “C’est moi qui pousse les manettes, c’est moi qui suis filmé et donc j’arrête” ».Dans son communiqué, France 2 souligne qu’« il ne s’agit en rien d’un programme de téléréalité». « Les documentaires qui seront diffusés lors de la soirée spéciale consacrée à ce sujet doivent permettre de comprendre les mécanismes de cette forme de télévision, le comportement des candidats, celui du public et enfin, celui des téléspectateurs et leurs rapports aux programmes extrêmes », assure la chaîne. France 2 précise enfin que les « résultats bruts » du tournage de Christophe Nick, auquel ont participé 80 candidats et qui a respecté « totalement » les conditions éthiques imposées par les scientifiques associés au projet, « doivent maintenant être analysés ». Les résultats ne seront pas officialisés « avant plusieurs mois ».

mardi 16 mars 2010

Le blog de Lou

En février, nous aurions dû nous rendre en Ré. Il en a été décidé autrement. Nous avons dû nous contenter des tristes images de la tempête Xynthia et de penser à nos amis rétais.
Il m’est déjà arrivé d’évoquer fort brièvement Lou dans ces pages. C’est cette voisine d’occasion sur l’ile de Ré qui joue du piano tandis que je musarde à la fenêtre. Parfois Swann gambade dans la cour. Ces derniers temps il en aurait été bien en peine, avec plus de un mètre cinquante d’eau dans les rues. Avec deux victimes et des dégâts importants, l’ile de Ré panse ses plaies et prépare difficilement la saison à venir.
Le soleil paraît-il pointe à nouveau le bout de son nez dans l’ile. Le beau temps va revenir. Emmanuelle, Lou & Swann aussi. Alors, peut-être, que le matin Lou jouera pour moi, les Inventions de Bach ou des sonates de Scarlatti comme les extraits de son travail qu’elle à mis sur un blog en langue anglaise. Je ne lis pas l’anglais. J’écoute tout simplement le blog de Lou.
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dimanche 14 mars 2010

Retour à la vie.

Un cancer n’est jamais une chose simple à gérer. Rosiane en a fait le terrible constat et tirée d’amères leçons depuis longtemps. Le mal n’épargne personne. Une lourde opération suivie d’un an de séances de chimiothérapie entre Gueret et Paris. Et l’embellie d’octobre dernier ne laissait augurer l’arrivée de nouveaux nuages bien noirs, de nouvelles douleurs, de nouvelles souffrances et de nouveaux combats. Pourtant en dépit de ses malheurs et de bien des turpitudes, Rosiane après avoir faillit bien des fois lâcher prise, vient de regagner en Creuse, cette maison familiale éternellement chargée de mille souvenirs enfouis qui forgent une mémoire. Bien sûr rien n’est résolu. Elle le sait. Le mal est toujours présent. De nouvelles séances de chimiothérapie annoncées. Mais Rosiane est une formidable battante. Elle a le sentiment de s’en être bien sortie. Les amis se sont arrêtés. Les amis se sont retrouvés. Les amis se sont embrassés. On parle de cet hiver qui dure et laissera bien des traces dans les âmes et dans les cœurs. On entend le vent violent s’engouffrer sous les combles La nature terne, comme abandonnée, garde bien des stigmates des assauts du froid et de la neige.
Rosiane a poussé les volets sur une campagne assoupie. Gribouille, notre bon vieux chat SDF, est venu vite reprendre ses quartiers d’été. Les chattes soufflent et feulent devant l’intrus. Il va bien falloir cohabiter. L’horloge marque à nouveau le temps. Le feu crépite dans le foyer. Après cet hiver lourd, La vie reprend ses droits dans la maison vide. Rosiane régit tout ce petit monde avec assurance et énergie. Elle a retrouvé son sourire et ses grands éclats de rire chaleureux. Son tendre regard a nouveau pétille. Il y a tant à faire, pense-telle. Elle croit de nouveau fort à la vie. A toutes et tous, la radieuse arrière grand-mère de la toute jeune Romane, vous adresse le bonjour.

Gribouille la fripouille.

samedi 13 mars 2010

Romane

On n’y croyait plus. Pourtant, le printemps s’est pointé ces jours-ci avec un peu d’avance sur l’horaire. Dotée d’un sourire craquant et d’une adorable frimousse qu’elle masque timidement sous une abondante chevelure, Romane est venue ensoleillée la fin d’hiver bien frileux de ses parents, encore tout ébaubis d’une si belle et soudaine apparition.
Selon la formule consacrée, Romane et sa maman se portent bien. Le papa aussi.