mercredi 28 mai 2014

Servian hors saison (9)




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Le château de l’Hermitage ! Un château de l’enfance dont parfois résonnait le nom au hasard des conversations adultes. Tata Elvire y travaillait. Pour le reste cela ne regardait pas les enfants. On y passait parfois en voiture sans nous y arrêter et je regardais les tours et les enceintes de ce château aussi mystérieux que celui de La Belle et la Bête. 



                                                Vendanges au château de l'Hermitage en 1947





Elvire  était assise sur les dernières marches de sa maison rue Armand Fallières. Des clapiers proches elle en avait tiré deux pigeons. Elle en tenait un dans chaque main, les doigts sous les ailes, et leurs compressaient les poumons jusqu’à les étouffer. Ceux-ci battaient de l’aile, dodelinaient de la tête et tournaient de l’œil avant de tirer leur révérence. Si d’aventure l’animal n’était pas occis, tata Elvire lui brisait les cervicales d’un tour de cou. Vlanpancrac ! Il était mort. Comment cette femme aux yeux si clairs pouvait se révéler si cruelle ?
Pareil pour les lapins. Elle tenait le condamné suspendu par les pattes arrière, l’étourdissait d’un coup sec sur la nuque, afin que son cœur batte encore lors de la saignée, puis lui tranchait les carotides. Une fois vidé de son sang elle enlevait le pyjama au jeannot et je récupérais une patte, conservée jusqu’à ce qu’elle soit découverte par ma mère et finisse à la poubelle. Mais je m’égare. Revenons à nos pigeons. Dans une volée de plumes j’attendais toujours une réponse à ma question :

« Dis, tata, a qui il appartient le château où tu travailles ?

- A Moussioulouduc . »

J’avais bien des fois entendu parler de ce Moussioulouduc sans savoir qu’il était propriétaire du château de l’Hermitage. Ma tante était sa cuisinière. Lorsque je fus contraint d’avaler quelques bouchées de pigeons aux petits pois, j’appris que Moussioulouduc adorait cela et ne laissait pas sa part aux chiens. Il s’en passait de belles dans les tours du château. 

Un jour, il vint même à Paris s’inviter chez nous dans le poste de télévision. L’académicien Antoine Lévis-Mirepois me fut alors présenté comme le propriétaire du château où travaillait tata Elvire. Il me paraissait bien plus fréquentable que ce Moussioulouduc dont on m’avait parlé , même si Mirepois et petit pois jetait le doute dans mon esprit.

Avec le temps ce Moussiouloudouc m’est resté familier sans vouloir le connaître ni chercher à franchir l’enceinte de sa demeure. Bien entendu Moussioulouduc est maintenant décédé. Et il y avait belle lurette qu’il s’était séparé du château.


Jean-Luc en 1947 avec Tata Marie-Rose et tata Elvire.

Mon frère ainé l’a connu mieux que moi, puisqu’il a effectué bien des fois les vendanges avec mes tantes Marie-Rose et Elvire, cuisinière et «meneuse», pas de revue, mais celle qui gérait le rythme de tous les coupeurs.






A la demande de Geneviève Forasiepi, les actuels propriétaires ont eu l’élégance de m’ouvrir leurs portes et me faire visiter le château et bien entendu la cuisine, intégrée désormais à l’un des vingt-cinq appartements de charme à la configuration unique et au décor personnalisé qu’ils proposent.












Les  propriétaires ont effectué un gros travail de rénovation. Ceux-ci ont reconstitué alors toute la propriété en rassemblant un vignoble de quarante hectares avec le château ainsi qu’un parc et jardin de six hectares. Il accueille aujourd’hui dans un cadre entièrement restauré, hôtes, animations, spectacles, concerts et vient d’ouvrir un restaurant.















l'ouvrage de Pierre Roques L'Hermitage de Combas éditions Pro Baetis peut être commandé 2 rue de la Comédie 34290 SERVIAN























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