samedi 31 mai 2014

Servian hors saison (11)

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Mon séjour prend fin. Dans quelques heures je quitterai le village pour prendre le TGV en direction de Paris.





Je passe le pont, en caresse le parapet, jette un œil attendri sur la Lène qui peut se révéler si terrible et sort du village par l’avenue d’Espondheillan. A l’époque de l'adolescence, nous y traînions notre mélancolie et notre ennuie en grillant quelques clopes avec les potes. Notre tristesse aussi en se quittant au terme d’un mois de vacances.







 Mon cœur s’évade dans les campagnes. Marcou, La Cartoule, Bel Air. Immuable, le village dans le lointain. Un village qui s’est certes étoffé, s’est modernisé mais en fin de compte n’a guère changé. Son cœur est et restera au fond du mien toujours le même.






Cette dernière journée comme toutes les autres est délicieusement nonchalante. Tout ce que j’escomptais faire là été bien entendu de travers, fait de rencontres, de discussions, de flâneries, de paresse, de rêveries. Un air de liberté a flotté dans l’air tout au long de cette semaine. J’ai pu déambuler au gré de mon inspiration dans ces belles ruelles tortueuses.






Porté par mon vague à l’âme j’ai retrouvé mille et une images restées tapies dans une mémoire qui ne m’a pas trop fait défaut. J’ai cherché bien en vain de fantomatiques commerces. Qu’importe, ils rôdent toujours derrière les brumes de mon esprit. 

Le marchand de journaux et de tabac de la Grand Rue chez qui je dépensais quelques francs en sucrerie et en livres de la Bibliothèque verte. Le tabac du Jeu de Ballon. L’épicerie Rossignol. La boucherie Nicouleau (?) et sa rangée de chaises où patientaient de bavardes clientes. Les belles flûtes du boulanger dans la montée de la rue Pasteur. La pâtisserie des parents d’Alain Planes rue du Commerce, homonyme d’un pianiste dont j’écoute l’interprétation des sonates de Schubert. 

L’épicerie de la rue des Baumes, dont j’ai retrouvé l’atmosphère dans celle de Baptiste Fabre, joué par Fernand Charpin, dans le Schpountz de Marcel Pagnol. Soyons sérieux. L’atmosphère seulement. Je ne veux pas faire offense à cet honorable commerce, car ici pas « d’anchois des tropiques » mais des anchois frais, des maquereaux, des condiments et des olives aux noms chantant préparées en vertes et en noires. 

Ma grand-mère Mathilde les tirait une à une de son cornet de papier sulfurisé et les portait à sa bouche avec une satisfaction évidente. Elle les faisait rouler dans sa bouche d'une joue à l'autre comme un enfant le ferait d'un bonbon. Puis elle les déshabillait du bout des dents, pompait le suc avant d'en avaler la chair. Elle ne gardait que le noyau pour tenter d'en extraire le jus.

Mais il me faut partir. Laisser Mathilde, Elvire, Marcelle, Emilien, Annie, Michelle, tonton René, André, Claude, Jacques, Cécile, Madame Salvi, Rossignol, tant d’autres… tout ceux qui au cours de ce séjour j'ai eu le plaisir de rencontrer ou de revoir, sortir du village et rejoindre Béziers, les allées Paul Riquet, je jardin des poètes et la gare. 



Le train n’a pas encore adopté cet air frondeur de TGV et se traîne le long de la Méditerranée, comme un estivant en avance sur la saison, d’Age à Sète, le temps de lorgner les premiers bains de soleil et le manège des ailes multicolores des kitesurfs sur l’étang de Thau, avant de glisser ensuite jusqu’à Montpellier charger son flot de passagers.

Documentations

- Marie-Thérèse Crouzet et Art et Culture, Servian en Languedoc 1900-2000, Editions Art et Culture (lien) (2001).
- Jacques Astor, histoire de Servian,(1980)
- Jean-Luc Esperou, Pierre Roques, Servian, Editions Pro Baeteris, 2 rue de la Comédie, Servian.
- Pierre Roques avec la collaboration d'Albert Martinez, L'Hermitage de Combas Servian, Editions Pro Baeteris, 2 rue de la Comédie, Servian.
- Servian et son patrimoine, brochure de l'Association Art et Culture.



1 commentaire:

Nikole a dit…

Effectivement, nos états d'âme ont quelque chose de commun. Je ne fais que passer vite par une curiosité soudaine, pas le temps là, mais je reviendrai me promener ici, plus longtemps, dans les attachantes ruelles nostalgiques de vos souvenirs. Merci.