vendredi 6 janvier 2012

The Who : Quadrophenia



"Après un copieux Live at Leeds en 2010, c'est au tour de Quadrophenia, l'ultime opéra rock de Pete Townshend et dernier enre­gistrement majeur des Who, de recevoir les honneurs d'une édition de luxe. Nombre de coffrets de poids pour fans en fonds se résument trop souvent à de beaux objets n'apportant pas grand-chose à l'oeuvre originale, mais ce Director's Cut méticuleusement agencé par Townshend en personne se distingue."

"A sa parution, en 1973, le double album pouvait laisser sceptique. Après l'urgence des singles sixties, le souffle mélodique du peu compréhensible Tommy, le déluge sonique hendrixien de Live at Leeds et la flamboyance épique de Who's next, Quadrophenia, par sa trame complexe, ses envolées progressives (forte présence du synthétiseur) et, surtout, un son qui manquait d'éclat, présentait des Who en panne d'énergie. Est-ce le recul historique, un travail remarquable de remastérisation, une foison de démos initiales (très abouties) ou l'épais ouvrage richement illustré contenant un texte fouillé de Townshend qui nous font redécouvrir l'oeuvre aujourd'hui ? Tout cela à la fois. Quadrophenia, le récit d'une quête existentielle, celle de Jimmy, jeune mod en colère (un peu beaucoup Townshend), qui voyait sa personnalité exploser en quatre (celles on ne peut plus opposées des membres du groupe), sa soif d'absolu se dissolvant dans la réalité d'un monde adulte que l'on rejoint inexorablement."

"Quadrophenia ne raconte rien d'autre que ça : l'impossibilité de faire perdurer la révolte, la vigueur et l'intensité de ses jeunes années. Un constat qui semblait frapper les Who, héros mods dont la profession de foi fut : « J'espère mourir avant d'être vieux. » Quadrophenia résonne comme un baroud d'honneur en forme de mélancolique mais lucide observation : il signale la fin de l'utopie d'une musique éternellement enragée et immature. Un manifeste plus pertinent que jamais."


Hugo Cassavetti Telerama n° 3232 - 24 décembre 2011



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