vendredi 20 janvier 2012

Pierrot Men : Chroniques malgaches




La photographie africaine recèle des perles inestimables, Pierrot Men en fait incontestablement partie. Entré sur la scène internationale lors des premières Rencontres de Bamako (Mali) en 1994, le multi récompensé photographe malgache (prix Leica Mother Jones à San Francisco en 1995, médaille d’or des Jeux de la francophonie à Madagascar en 1997, prix UNEP/Canon en 2000…), sort une monagraphie intitulée Chroniques malgaches.


Ce grand amateur de jeux d’ombre et de lumière, né en 1954 et viscéralement attaché à Fianarantsoa sa ville, creuse inlassablement depuis une trentaine d’années son sillon dans la photographie humaniste, à l’affût des bribes du quotidien des malgaches qui sous son œil, se transforment en pépites de poésie, et dénichant au détour des paysages contrastés de la Grande Ile, sa matière première.

Comment sont nées ces Chroniques malgaches ?

Après avoir fait découvrir mon travail dans diverses expositions, j’ai décidé de rassembler une partie de mes clichés dans un ouvrage. Je n’ai pas choisi les photos qui y figurent suivant un thème particulier, car je ne me situe pas dans une démarche photographique dite classique. Je me sens plutôt comme un chroniqueur de la vie de tous les jours, un observateur des petits riens qui immortalise pêle-mêle, ce qui attire son regard.


La photographie n’était pas d’emblée une vocation, quel a été l’élément déclencheur ?Je suis un autodidacte de la photo. Au départ, j’étais peintre, et je me servais comme base de travail des photos de paysages et sujets que je prenais moi-même. Après une dizaine d’années à fonctionner de cette manière, sur le conseil de mon entourage proche qui trouvait que je photographiais mieux que je ne peignais, j’ai plongé dans la photographie ! Mais la peinture continue à influencer mon travail de photographe, notamment dans le choix du cadre, de la composition et de la lumière.


Comment travaillez-vous, avez –vous un matériel de prédilection ?

J’ai un véritable attachement sentimental au Leica, j’en ai trois dont un Leica M6 que j’utilise régulièrement pour mes photos en noir et blanc. Pour la couleur, j’ai adopté un Nikon numérique. Je ne fais jamais de repérages, je fonctionne au gré de mon inspiration et des rencontres. Et j’aime prendre le temps de chercher. Je revendique une approche artisanale de la photographie. J’ai juste des envies, des désirs de nouvelles rencontres. Par exemple, en ce moment j'aimerais bien photographier le nord de Madagascar.


Vos photos dépeignent pourtant souvent Fianarantsoa…

C'est vrai. On ne photographie bien que ce que l’on connaît le mieux, et pour ma part, c’est Fianarantsoa. J’y vis, j’y travaille (ndlr : dans le Labo Men, son propre studio photo).


Quand on vit à Madagascar, l’un des pays les plus pauvres de la planète, vacillant au gré des crises politiques, témoigner de la situation du peuple malgache est-il une obligation morale? Se sent-on investi d’un rôle d’ambassadeur ?

 Je ne me considère pas comme un photographe de la misère, même si sur un plan personnel, je l’ai connue quand je vivais plus jeune dans la brousse. Mon rôle n’est pas de montrer la pauvreté mais au contraire, d’attirer le regard sur la dignité des malgaches. Ce que j'aime par dessus-tout, c'est de mettre de la lumière et de la poésie là où on l’on ne s’y attend pas.

Et en parlant de misère, vous savez elle est partout. Juste cette semaine, lors de mon passage à Paris, j’ai rencontré et photographié des mendiants rue de Rivoli...
Propos recueillis par Roxane Ghislaine Pierre

Pierrot Men, Chroniques malgaches, éd de l'Oeil

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