mercredi 28 janvier 2009

Le syndrome de Roncevaux

Depuis quelque temps j’ai constaté quelques troubles auditifs, notamment une corne de brume, permanente et lointaine, au creux de mon oreille droite comme si une flottille de caboteurs rentraient au port un jour de brouillard. J’ai donc consulté. Les mains moites, installé dans le fauteuil, l’aveuglante lumière de la frontale, dont se ceignit l’autorhinolaryngologiste, me plongea en état d’hypnose. Je glissai mes pieds sous la barre circulaire du fauteuil afin de lui permettre une approche confortable. Sur ses injonctions je tirai une langue chargée qu’il saisit et maintint sortie. Cette position incommode, m’interdisait toute protestation. Il m’avait bien en main. Je crispai mes orteils au point de pouvoir chausser trois pointures en dessous. A l’aide d’un abaisse-langue, il dégagea ma gorge. L’angoisse était à son comble. Je n’en montrai rien. J’avais tout simplement le trou du cul complètement ratatiné. Rien de grave. Je respirais par la bouche tel un phoque. Ma coopération à l’examen était des plus honorables. Hélas, il ne s’en contenta pas. La luette dans sa ligne de mire, il me réclama un khêêêêêêê! Auquel je ne pus répondre que par une plainte de lavabo en détresse. « - Détendez-vous » me susurra-t-il. Le contact rugueux de l’abaisse-langue se fit plus pressant. Le khêêêêêê! exigé, se transforma en grognements suivis de borborygmes divers et variés. Il lui était recommandé d'échanger sa blouse blanche contre un suroît et un ciré. Je n’allais pas tarder à régurgiter mon gratin dauphinois s'il continuait à s’acharner ainsi sur ma modeste personne. Nous nous octroyâmes une pause. J’écrasai deux larmes et avalai un verre d’eau. L’examen transita sur l’oreille droite, la malade. J'en avais le pavillon cramoisi. Il perçait la brume de son poinçon lumineux. Tout était calme dans le petit port de pêche de St Pierre et Miquelon. Nous sommes sortis faire une petite promenade en mer. - « Effectivement.. ». Son commentaire ne me dit rien qui vaille. Je ne le laissai pas achever son diagnostic et lâchais un « Ah! » tonitruant et bondis du fauteuil. Dans ma précipitation, j’en oubliai la barre circulaire. J'embarquai le praticien dans un corps à corps endiablé et lui arrachai au passage la lampe frontale. Une fois remis de nos émotions, il me signifia que je n’avais strictement rien. Donc ce bourdonnement interne n’était qu’une rumeur. Je demandais si le simple fait d’avoir passer quatre ans dans la marine pouvait avoir un rapport avec la corne de brume ? « Pourquoi pas le syndrome de Roncevaux !» rétorqua t-il, imperturbable. - « C’est grave ? » j’ai couiné. « Non, mais ça vous coûtera soixante euros, que vous voudrez bien régler à ma secrétaire» souffla t-il de façon presque inaudible. – « Soixante euros ! Vous avez dit soixante euros ? ». Il opina du chef. – « Vous voyez, vous allez déjà mieux. »

1 commentaire:

finmars a dit…

Bonjour,
Je sens que je vais faire un "hors sujet " !
Je suis a la recherche d'un livre d histoire scolaire des annees 60 et l'image sous " le syndrome de roncevaux" doit surement en faire partie !
pourriez vous SVP me donner les coordonnées du livre duquel elle est tiree ?
je vous remercie par avance
Pierre