
jeudi 31 mars 2011
mercredi 30 mars 2011
Dans l'intimité des frères Caillebotte

La mise en regard inédite des tableaux de Gustave et des photographies de Martial invite le visiteur à entrer dans l’intimité d’une grande famille parisienne et à plonger dans la nouvelle vie citadine qui s’installe à l’aube du XXe siècle. Les frères Caillebotte se font en effet les témoins d’une époque en pleine mutation urbaine et technique, mais aussi d’un art de vivre si souvent illustré par les artistes impressionnistes.
UNE EXPOSITION INEDITE



mardi 29 mars 2011
Guido Crepax, Valentina
lundi 28 mars 2011
Apologie du livre de Robert Darnton

Pour prévoir l'avenir, il faut connaître le passé. Cette évidence devrait conduire tous ceux qui veulent comprendre la révolution numérique à lire ce recueil d'essais de Robert Darnton, peut-être le plus grand historien du livre vivant, par ailleurs directeur de la bibliothèque universitaire de Harvard. L'auteur fait le parallèle entre l'explosion des modes de communication électronique et l'invention de l'imprimerie à caractères mobiles par Gutenberg il y a cinq siècles. Contrairement aux prophètes de l'avènement du tout-numérique, il croit à la persistance du bon vieux codex inventé il y a deux mille ans, tout comme à celle des bibliothèques qui ont été et ne cesseront d'être les centres du savoir. Adepte enthousiaste de Google, il s'inquiète cependant de ses tendances monopolistiques. Bref, il délivre une contribution nuancée et pragmatique au débat sur l'avenir du livre.
dimanche 27 mars 2011
Retour du Tchad, sur les traces d'André Gide

En 1925, André Gide part au Congo et au Tchad pour son plus long voyage. À son retour, deux récits sont publiés chez Gallimard (dont Le Retour du Tchad) dans lesquels l’auteur décrit au jour le jour cette aventure exceptionnelle, à la frontière de l’écriture et du reportage. Marc Allégret (futur grand cinéaste français) l’accompagne, photographie et filme ce périple.
Le Retour du Tchad de Gide est le fil conducteur de ce carnet de voyage : 80 ans plus tard, une équipe d’artistes tchadiens et français refait une partie de l’itinéraire à bord d’un radeau puis d’une pirogue et croise ses impressions avec celles de ses illustres prédécesseurs.

Au fil des fleuves, du lac Tchad, des rives du Logone et du Chari, les auteurs retrouvent les Massa, Kotoko, peuls et arabes qui peuplent depuis des siècles ces régions centrales de l’Afrique.
Textes et aquarelles dénoncent aussi l’inquiétante baisse des eaux des fleuves et du lac Tchad : problème environnemental dramatique.
Joël Alessandra, un aquarelliste spécialiste de l'Afrique qui lui a consacré déjà plusieurs albums et carnets de voyage dont Fikrie (inspiré de son expérience de directeur artistique à Djibouti, à La Boite à Bulles), Séjour en Afrique (La Boite à Bulles), Fierté de Fer (sur le train Djibouto-Ethiopien aux éditions Paquet).
Pascal Villecroix, assistant technique et conseiller du Ministre de l’Enseignement Supérieur du Tchad, responsable de 2003 à 2007 du département d'histoire-géographie à l’Université de Djibouti, et déjà auteur de La Caravane Rimbaud : paysages de Djibouti et La caravane Kessel : sur les traces de la grande piste en collaboration avec Joël Alessandra.
samedi 26 mars 2011
Eduquer au XXIème siècle par Michel Serres

vendredi 25 mars 2011
Manet, inventeur du moderne

jeudi 24 mars 2011
Le voyage imaginaire d'Hugo Pratt

À la Pinacothèque de Paris, du 17 mars 2011 au 21 août 2011
Le Voyage imaginaire d'Hugo Pratt
La Pinacothèque de Paris accueille, du 17 Mars au 21 Août 2011, une exposition des œuvres d’Hugo Pratt. A travers cette grande rétrospective, le public pourra découvrir toute l’étendue du talent du créateur de Corto Maltese.
Cette exposition présentera plus de cent cinquante aquarelles, pour la plupart peu connues du grand public, ainsi que des planches historiques, notamment la totalité des cent soixante-quatre planches de la mythique Ballade de la mer salée. Depuis la rétrospective du Grand Palais en 1986, c’est la première fois que Paris accueille une exposition consacrée à l’œuvre de cet artiste hors norme, considéré comme l’inventeur de la bande dessinée littéraire.
La vie d’Hugo Pratt est un véritable roman marqué par une généalogie qui brasse différentes cultures. Son existence et son travail sont influencés par sa culture littéraire –Robert Louis Stevenson, Joseph Conrad, Herman Melville, Jack London, Ernest Hemingway ou encore Antoine de Saint-Exupéry, auquel il consacre un album à la fin de sa vie: Le Dernier Vol– en même temps que par ses voyages aux quatre coins de la planète.
En 1967, après un périple aux Caraïbes, Hugo Pratt crée La Ballade de la mer salée, qui marque la première apparition de Corto Maltese. C’est une véritable révolution dans le neuvième art: jamais l’art du conteur et celui du narrateur n’avaient été à ce point unis.
mercredi 23 mars 2011
Hervé Guibert Photographe

Je tenais à remercier celui qui sous le pseudonyme "Olympus" m'a signalé cette exposition Première rétrospective en France de l'œuvre photographique d'Hervé Guibert, cette exposition regroupe 230 tirages de l'écrivain photographe, et présente son film, La Pudeur ou L'Impudeur. À sa mort, le 27 décembre 1991, Hervé Guibert était salué comme le jeune écrivain libre et flamboyant que son livre "À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie" venait de rendre célèbre. On indiquait aussi qu'Hervé Guibert laissait une œuvre photographique reconnue et publiée. Ponctuée d'escales, habitée d'êtres aimés, l'œuvre franchit sans effort le passage de l'intime à l'universel, aux heures lumineuses des rencontres et des voyages comme aux derniers mois consumés par le sida. La photographie invente chez Hervé Guibert une ligne narrative plus intime qu'autobiographique, laissant au stylo ou à la vieille machine à écrire, figurants intelligents de plusieurs images, le soin de prendre les notes d'un éventuel journal. Les photographies que laissent Hervé Guibert, passionné par Rembrandt, s’adressent intimement au regard du visiteur. Une œuvre intégralement réalisée avec le petit appareil Rollei 35 donné très tôt par son père. 15 ans de production photographique retracés en 200 tirages noir et blanc à la Maison Européenne de la Photographie à Paris jusqu’au 10 avril
15 ans de production photographique retracés en 200 tirages noir et blanc à la Maison Européenne de la Photographie à Paris jusqu’au 10 avril
mardi 22 mars 2011
Le petit garagiste


« Le petit garagiste est avant tout un voyage au coin de la rue, une découverte à domicile. La première fois que j’ai découvert le garage en bas de chez moi, je me suis littéralement fait transporter dans un univers. Je suis sensible à l’ambiance que peut dégager un espace quel qu’il soit, et ici, l’atmosphère que j’ai entrevue m’a tout de suite captivée ; à la fois dense et lumineuse, chaude et humide. Une unité à part entière. » Après cette première rencontre, Guillaume Martial sillonne à bicyclette les quartiers alentours de l’Ecusson (centre-ville de Montpellier) à la recherche de ces petits garagistes. Il y rencontrera ainsi mécaniciens, électriciens automobiles, peintres en carrosserie, selliers, réparateurs de radiateurs automobiles, spécialistes en voitures de collection… une vingtaine d’ateliers lui ouvre leur porte. L’architecture atypique de ces ateliers allie souvent plusieurs matières (pierre, bois, métal, verre, plastique). Chaque atelier dégage une atmosphère particulière. Les murs portent l’empreinte des hommes qui se sont approprié ces espaces de travail, quelquefois depuis plusieurs générations. « Je trouvais ces lieux emprunt d’une extrême beauté plastique, chargée d’histoire. J’aime les murs qui parlent, quand la matière s’exprime de façon authentique ».

Le petit garagiste, texte de Lilian Berthelot, photos deGuillaume Martial, Editions Singulières
lundi 21 mars 2011
Stéphane Duroy : Distress

Du 3 mars 2011 au 23 avril 2011, In Camera Galerie à Paris.
Ces photographies ont été choisies avec un fort parti pris dans un travail réalisé dès 1971 au Royaume Uni : Pays de Galles, Irlande du Nord, Angleterre, Ecosse, ainsi qu’en Irlande et en Bretagne.
Cette description de la condition humaine, de ses frustrations interminables, entre ennui et résignation, réactualise les injustices profondes qui, tout au long du XX° siècle, ont plongé les peuples européens dans une tragédie sans fin.
Hier, le reniement de leurs valeurs humanistes par les nations européennes, aveuglées par la peur a précipité nombre d’entre elles dans l’abjection totalitaire.
Aujourd’hui, recrudescente, la détresse humaine demeure — quelque soit son visage…solitude, esclavage, antisémitisme, racisme — une menace réelle pour la collectivité quand un nombre infime d’individus accède au savoir laissant la majorité dans l’ignorance et le mépris.
Stéphane Duroy
dimanche 20 mars 2011
Salon du livre de Paris 2011

Cette année, le Salon du livre de Paris met à l’honneur non pas un, mais cinq pays !
Cinq pays du Nord dont la littérature est aussi riche que la culture. Roman, polar, essai, jeunesse... Le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège et la Suède, viendront jusqu’à nous, pour nous faire découvrir une littérature foisonnante et pleine de surprises.
samedi 19 mars 2011
August Sander à Nice

August Sander compte parmi les grands photographes du XXe siècle. On connaît de lui surtout ses très beaux portraits qu’il réalise dès 1910 dans son studio de Cologne. Pourtant, tout au long de sa vie, il construit une œuvre globale, incluant aussi le paysage et les études botaniques, l’homme et la nature ayant à ses yeux la même importance artistique. Il a laissé une œuvre immense dont la lucidité et l’obsession de vérité furent d’une grande modernité.
L’exposition qui se tiendra jusqu’au 15 mai 2011 au Théatre de la Photographie et de l’image de Nice.regroupera autour de ces trois thèmes : portraits, paysages et architecture, 120 images dont une partie en tirages d’époque ou tirages postérieurs réalisés par son fils, Gunther à qui il a laissé un inestimable patrimoine riche de 10.000 négatifs, et proposera ainsi au visiteur un panorama représentatif du travail artistique de ce grand photographe. auxquels le Théâtre de la Photographie et de l’Image de Nice entend rendre régulièrement hommage en présentant des ensembles de pièces majeures qui ont marqué l’Histoire de la Photographie et dont l’influence sur nombre de photographes et artistes contemporains reste aujourd’hui très présente.
L’exposition a été conçue par Gerd Sander, petit-fils d’August Sander, et organisée en collaboration avec la Galerie Priska Pasquer, à Cologne et le Théâtre de la Photographie et de l’Image.
August Sander : Portraits, paysages, architecture, jusqu’au 15 mai 2011 au Théatre de la Photographie et de l’image de Nice.
vendredi 18 mars 2011
Vanessa Winship : Not Only Rare Birds Sing -

jeudi 17 mars 2011
Les aubépines

"Je le trouvai tout bourdonnant de l'odeur des aubépines. La haie formait comme une suite de chapelles qui disparaissaient sous la jonchée de leurs fleurs amoncelées en reposoir ; au-dessous d'elles, le soleil posait à terre un quadrillage de clarté, comme s'il venait de traverser une verrière ; leur parfum s'étendait aussi onctueux, aussi délimité en sa forme que si j'eusse été devant l'autel de la Vierge, et les fleurs, aussi parées, tenaient chacune d'un air distrait son étincelant bouquet d'étamines, fines et rayonnantes nervures de style flamboyant comme celles qui à l'église ajouraient la rampe du jubé ou les meneaux du vitrail et qui s'épanouissaient en blanche chair de fleur de fraisier. Combien naïves et paysannes en comparaison sembleraient les églantines qui, dans quelques semaines, monteraient elles aussi en plein soleil le même chemin rustique, en la soie unie de leur corsage rougissant qu'un souffle défait."
"Mais j'avais beau rester devant les aubépines à respirer, à porter devant ma pensée qui ne savait ce qu'elle devait en faire, à perdre, à retrouver leur invisible et fixe odeur, à m'unir au rythme qui jetait leurs fleurs, ici et là, avec une allégresse juvénile et à des intervalles inattendus comme certains intervalles musicaux, elles m'offraient indéfiniment le même charme avec une profusion inépuisable, mais sans me le laisser approfondir davantage, comme ces mélodies qu'on rejoue cent fois de suite sans descendre plus avant dans leur secret. Je me détournais d'elles un moment, pour les aborder ensuite avec des forces plus fraîches. Je poursuivais jusque sur le talus qui, derrière la haie, montait en pente raide vers les champs, quelque coquelicot perdu, quelques bluets restés paresseusement en arrière, qui le décoraient çà et là de leurs fleurs comme la bordure d'une tapisserie où apparaît clairsemé le motif agreste qui triomphera sur le panneau. Rares encore, espacés comme les maisons isolées qui annoncent déjà l'approche d'un village, ils m'annonçaient l'immense étendue où déferlent les blés, où moutonnent les nuages, et la vue d'un seul coquelicot hissant au bout de son cordage et faisant cingler au vent sa flamme rouge au-dessus de sa bouée graisseuse et noire, me faisait battre le cœur, comme au voyageur qui aperçoit sur une terre basse une première barque échouée que répare un calfat et s'écrie, avant de l'avoir encore vue : " La Mer ! " Puis je revenais devant les aubépines comme devant ces chefs-d’œuvre dont on croit qu'on saura mieux les voir quand on a cessé un moment de les regarder, mais j'avais beau me faire un écran de mes mains pour n'avoir qu'elles sous les yeux, le sentiment qu'elles éveillaient en moi restait obscur et vague, cherchant en vain à se dégager, à venir adhérer à leurs fleurs. Elles ne m'aidaient pas à l'éclaircir, et je ne pouvais demander à d'autres fleurs de le satisfaire."
"Alors me donnant cette joie que nous éprouvons quand nous voyons de notre peintre préféré une œuvre qui diffère de celles que nous connaissions, ou bien si l'on nous mène devant un tableau dont nous n'avions vu jusque-là qu'une esquisse au crayon, si un morceau entendu seulement au piano nous apparaît ensuite revêtu des couleurs de l'orchestre, mon grand-père m'appelant et me désignant la haie de Tansonville, me dit : " Toi qui aimes les aubépines, regarde un peu cette épine rose ; est-elle jolie ! " En effet c'était une épine, mais rose, plus belle encore que les blanches. Elle aussi avait une parure de tête - de ces seules vraies têtes que sont les têtes religieuses, puisqu'un caprice contingent ne les applique pas comme les têtes mondaines à un jour quelconque qui ne leur est pas spécialement destiné, qui n'a rien d'essentiellement férié. - Mais une parure plus riche encore, car les fleurs attachées sur la branche, les unes au-dessus des autres, de manière à ne laisser aucune place qui ne fût décorée, comme des pompons qui enguirlandent une houlette rococo, étaient " en couleur", par conséquent d'une qualité supérieure selon l'esthétique de Combray, si l'on en jugeait par l'échelle des prix dans le "magasin" de la Place, ou chez Camus où étaient plus chers ceux des biscuits qui étaient roses. Moi-même j'appréciais plus le fromage à la crème rose, celui où l'on m'avait permis d'écraser des fraises. Et justement ces fleurs avaient choisi une de ces teintes de chose mangeable, ou de tendre embellissement à une toilette pour une grande tête, qui, parce qu'elles leur présentent la raison de leur supériorité, sont celles qui semblent belles avec le plus d'évidence aux yeux des enfants, et à cause de cela, gardent toujours pour eux quelque chose de plus vif et de plus naturel que les autres teintes, même lorsqu'ils ont compris qu'elles ne promettaient rien à leur gourmandise et n'avaient pas été choisies par la couturière."
"Et certes, je l'avais tout de suite senti, comme devant les épines blanches mais avec plus d'émerveillement, que ce n'était pas facticement, par un artifice de fabrication humaine, qu'était traduite l'intention de festivité dans les fleurs, mais que c'était la nature qui spontanément, l'avait exprimée avec la naïveté d'une commerçante de village travaillant pour un reposoir, en surchargeant l'arbuste de ces rosettes d'un ton trop tendre et d'un pompadour provincial."
"Au haut des branches, comme autant de ces petits rosiers aux pots cachés dans des papiers en dentelles, dont aux grandes têtes on faisait rayonner sur l'autel les minces fusées, pullulaient mille petits boutons d'une teinte plus pâle qui, en s'entrouvrant, laissaient voir, comme au fond d'une coupe de marbre rose, de rouges sanguines et trahissaient plus encore que les fleurs, l'essence particulière, irrésistible, de l'épine, qui, partout où elle bourgeonnait, où elle allait fleurir, ne le pouvait qu'en rose. Intercalé dans la haie, mais aussi différent d'elle qu'une jeune fille en robe de tête au milieu de personnes en négligé qui resteront à la maison, tout prêt pour le mois de Marie, dont il semblait faire partie déjà, tel brillait en souriant dans sa fraîche toilette rose, l'arbuste catholique et délicieux."
Marcel Proust, Du côté de chez Swann.
mercredi 16 mars 2011
Le monde par le trou d’une aiguille

mardi 15 mars 2011
lundi 14 mars 2011
5ème rencontre internationale de la photographie au sténopé

dimanche 13 mars 2011
samedi 12 mars 2011
vendredi 11 mars 2011
Les asperges

"Je m'arrêtais à voir sur la table, où la fille de cuisine venait de les écosser, les petits pois alignés et nombrés comme des billes vertes dans un jeu ; mais mon ravissement était devant les asperges, trempées d'outremer et de rose et dont l'épi, finement pignoché de mauve et d'azur, se dégrade insensiblement jusqu'au pied - encore souillé pourtant du sol de leur plant - par des irisations qui ne sont pas de la terre. Il me semblait que ces nuances célestes trahissaient les délicieuses créatures qui s'étaient amusées à se métamorphoser en légumes et qui, à travers le déguisement de leur chair comestible et ferme, laissaient apercevoir en ces couleurs naissantes d'aurore, en ces ébauches d'arc-en-ciel, en cette extinction de soirs bleus, cette essence précieuse que je reconnaissais encore quand, toute la nuit qui suivait un dîner où j'en avais mangé, elles jouaient, dans leurs farces poétiques et grossières comme une féerie de Shakespeare, à changer mon pot de chambre en un vase de parfum. La pauvre Charité de Giotto, comme l'appelait Swann, chargée par Françoise de les “ plumer”, les avait près d'elle dans une corbeille, son air était douloureux, comme si elle ressentait tous les malheurs de la terre ; et les légères couronnes d'azur qui ceignaient les asperges au-dessus de leurs tuniques de rose étaient finement dessinées, étoile par étoile, comme le sont dans la fresque les fleurs bandées autour du front ou piquées dans la corbeille de la Vertu de Padoue. Et cependant, Françoise tournait à la broche un de ces poulets, comme elle seule savait en rôtir, qui avaient porté loin dans Combray l'odeur de ses mérites, et qui, pendant qu'elle nous les servait à table, faisaient prédominer la douceur dans ma conception spéciale de son caractère, l'arôme de cette chair qu'elle savait rendre si onctueuse et si tendre n'étant pour moi que le propre parfum d'une de ses vertus."
Marcel Proust, "Du côté de chez Swann".
jeudi 10 mars 2011
Cinq étranges albums de famille


mercredi 9 mars 2011
Intra Muros de Marc Villard

mardi 8 mars 2011
Jacques Bertin : Le chant d'un homme

lundi 7 mars 2011
Gallimard à cent ans

dimanche 6 mars 2011
Eric Legnini & the Afro Jazz Beat

samedi 5 mars 2011
Charade de Stanley Donen
vendredi 4 mars 2011
Le tilleul

"Le dessèchement des tiges les avait incurvées en un capricieux treillage dans les entrelacs duquel s'ouvraient les fleurs pâles, comme si un peintre les eût arrangées, les eût fait poser de la façon la plus ornementale. Les feuilles, ayant perdu ou changé leur aspect, avaient l'air des choses les plus disparates, d'une aile transparente de mouche, de l'envers blanc d'une étiquette, d'un pétale de rose, mais qui eussent été empilées, concassées ou tressées comme dans la confection d'un nid. Mille petits détails inutiles - charmante prodigalité du pharmacien - qu'on eût supprimés dans une préparation factice, me donnaient, comme un livre où on s'émerveille de rencontrer le nom d'une personne de connaissance, le plaisir de comprendre que c'était bien des tiges de vrais tilleuls, comme ceux que je voyais avenue de la Gare, modifiées, justement parce que c'étaient non des doubles, mais elles-mêmes et qu'elles avaient vieilli. Et chaque caractère nouveau n'y étant que la métamorphose d'un caractère ancien, dans de petites boules grises je reconnaissais les boutons verts qui ne sont pas venus à terme ; mais surtout l'éclat rose, lunaire et doux qui faisait se détacher les fleurs dans la forêt fragile des tiges où elles étaient suspendues comme de petites roses d'or - signe, comme la lueur qui révèle encore sur une muraille la place d'une fresque effacée, de la différence entre les parties de l'arbre qui avaient été "en couleur" et celles qui ne l'avaient pas été - me montrait que ces pétales étaient bien ceux qui avant de fleurir le sac de pharmacie avaient embaumé les soirs de printemps. Cette flamme rose de cierge, c'était leur couleur encore, mais à demi éteinte et assoupie dans cette vie diminuée qu'était la leur maintenant et qui est comme le crépuscule des fleurs.
Bientôt ma tante pouvait tremper dans l'infusion bouillante dont elle savourait le goût de feuille morte ou de fleur fanée une petite madeleine dont elle me tendait un morceau quand il était suffisamment amolli."
Marcel Proust, Du côté de chez Swann.
jeudi 3 mars 2011
mercredi 2 mars 2011
Marie-Antoinette de Sofia Coppola

Amoureux de l’Histoire, passez votre chemin.
Sofia Coppola a réalisé un film complètement déjanté basé sur la vie de Marie-Antoinette. Comme dans son premier film Virgin Suicides, la réalisatrice met en scène une jeune fille de 14 ans qui aspire à l’amour, à la séduction et au jeu, mais qui trouve ses désirs freinés par une force supérieure : son rôle de Reine de France, ainsi que l’attitude rigide et les devoirs que cela implique. Bien loin du film historique sombre et réaliste, Sofia Coppola a préféré axer son film sur les petites folies d’une Marie-Antoinette qui préfère l’amusement à la couronne.Marie-Antoinettenous plonge donc dans un univers totalement féminin, rempli de rose et de bonbons, de vêtements, chaussures et coiffures colorés et excentriques, de champagne et de pâtisseries aux colorants incroyables… un véritable univers de fête et d’amusement tout droit sortit d’une publicité Lolita Lempicka.
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mardi 1 mars 2011
Darren Aronofsky

Vous n’avez pas écrit le scénario de Black Swan. Comment vous êtes-vous emparé du sujet ?
Le scénario original se déroulait dans l’univers du théâtre, mais je l’ai transposé dans le monde de la danse, que je trouve particulièrement fascinant et que je connaissais par ma soeur. La danse occupait toute sa vie, c’était un vrai mystère pour moi, enfant. Ce film est donc très personnel, comme tous mes précédents. De même que The Wrestler, Black Swan dresse le portrait d’un corps supplicié sur l’autel de l’entertainment. Oui, dans ces deux films, les personnages utilisent leur corps pour faire de l’art. Ces corps explorent leurs limites, littéralement, et sont confrontés au vieillissement. En préparant Black Swan, j’ai regardé de nombreux films sur le ballet, dont La Danse de Frederick Wiseman. Il se trouve qu’il consacre son nouveau documentaire, Boxing Gym, à l’univers de la boxe. Il filme les deux disciplines avec une même attention aux jeux de jambes, aux mouvements des corps. Les univers du combat et de la danse sont très proches. Dans Le Baiser du tueur, Kubrick filmait d’ailleurs une histoire d’amour entre un boxeur et une danseuse…J’ai appris à aimer Kubrick avec le temps, en vieillissant. Ses films sont sophistiqués, ils ne se laissent pas saisir à la première vision. Le statut d’icône absolue qu’a Shining le place à un niveau très particulier. Regarder Shining, c’est un peu comme rendre visite à un vieil ami pour voir s’il a changé ou s’il est resté le même.
Black Swan est-il un conte de fée filmé selon les codes du film d'horreur ?
Oui, un conte de fée particulièrement noir. Nina ressemble à l’Alice du Pays des merveilles, sauf qu’elle ne traverse pas le miroir ; elle s’écrase littéralement dessus. Le terme « horreur » a un peu perdu son sens aujourd’hui, particulièrement aux États-Unis où beaucoup de films comportent des scènes gore. Donc faire un film d’horreur psychologique était une de mes ambitions.
La plupart de vos personnages souffrent d’addiction, qu’elle soit toxique, professionnelle ou sentimentale. Pourquoi cette fascination ?
C’est ainsi que je conçois la nature humaine. Je crois que les gens sont tous plus ou moins obsessionnels. Vous seriez surpris de découvrir tous les rituels auxquels les gens s’accrochent, dans l’intimité de leur maison.
La scène d’ouverture est d’une extrême simplicité : comment l’avez-vous pensée ?
Au moment de tourner cette scène, nous n’avions plus d’argent. Nous avons dû la simplifier au maximum : une danseuse, une pièce noire et un unique projecteur. Si vous réussissez une scène avec ces seuls éléments, c’est que vous êtes sur la bonne voie.
Le dernier tournage qui avait eu lieu dans ce lieu était celui de la scène finale d’All That Jazz de Bob Fosse. On sentait une sorte de magie planer dans la pièce. Aviez-vous des références filmiques précises ?
On pense notamment à Suspiria de Dario Argento et Phantom of the Paradise de Brian de Palma… Je n’ai pas vu Phantom of the Paradise, mais j’ai regardé Dressed to Kill du même réalisateur. Nous avons également visionné Les Chaussons rouges et Les Contes d’Hoffmann de Michael Powell et Emeric Pressburger, La Mouche de David Cronenberg, Répulsion de Roman Polanski… Black Swan utilise les ficelles classiques de l’horreur ; il y a peu de moyens d’effrayer les spectateurs. Je ne sais pas si vous pouvez rendre ces ficelles originales, mais vous pouvez les détourner, vous en amuser. Il y a dans Black Swan un plan où le cadre est traversé, au fond, par une ombre furtive. J’ai volé ça au Sixième Sens de M. Night Shyamalan.
À la différence des Chaussons rouges, où la caméra était statique, votre mise en scène accompagne et amplifie les mouvements des danseurs. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Tout simplement parce qu’aujourd’hui la technique le permet. Ce n’était pas le cas à l’époque. C’est très excitant d’avoir une caméra qui danse avec les acteurs. Lorsqu’on regarde de la danse assis dans un fauteuil, cela semble très facile. On ne se rend pas compte de la souffrance, des efforts, du sang.
Comment arrive-t-on à créer une telle illusion ?
C’est ce qui m’a poussé à enlever la caméra du fond de la salle pour l’installer sur la scène.
Peut-on considérer le personnage du directeur de ballet, interprété par Vincent Cassel, comme votre double ?
Vincent se défend de s’être inspiré de moi, peut-être parce que je ne suis pas assez haut en couleurs. Mais j’aimerais pouvoir être aussi manipulateur que son personnage, qui est constamment dans le calcul. Je suis beaucoup plus direct, je vais droit au but avec mes acteurs et j’en ai fait fuir beaucoup. Je leur dis de manière très claire à quel point ce sera un défi de travailler avec moi ; beaucoup s’en effraient.
Pourquoi vous êtes-vous tourné vers Natalie Portman pour jouer le rôle de Nina ?
J’ai pensé à elle très tôt, et plus le projet prenait du temps, plus elle prenait de l’âge. Du coup, le personnage a évolué en fonction d’elle : dans le film, Nina a 25 ou 26 ans, ce qui est jeune en soi mais pas pour une danseuse. Natalie a fait de la danse enfant, mais elle a dû tout réapprendre en travaillant très dur, près de huit heures par jour pendant un an. L’engagement était complet pour elle, puisque j’ai vraiment cherché à installer lespectateur dans la tête de Nina : le film se concentre sur son expérience, son cerveau, son âme. En français, le terme « psyché » désigne à la fois l’âme et une grande glace mobile.
Multiplier les miroirs dans le film était-il un moyen de souligner la schizophrénie dont souffre votre héroïne ?
On savait dès le départ que les miroirs auraient une place importante, notamment parce que l’univers de la danse est saturé de miroirs dans les salles de répétition. Il se trouve que Black Swan traite aussi du fait de perdre son identité. Le film multiplie les figures du double, comme lorsque vous vous placez entre deux miroirs et que vous continuez à vous refléter, à perte de vue.
