Voici donc ce Jeu de l'Amour et du Hasard d'une cruauté infinie composé par Mozart et écrit par Da Ponte, par lequel le prodigieux René Jacobs a abordé l'univers lyrique d'Amadeus. Tempos rafraîchissants, direction alerte, tout sonne de façon nouvelle et personnelle dans la lecture de ce chef-d'œuvre. L'orchestre, jouant sur instruments d'époque, tisse un écrin pour les voix des jeunes chanteurs.
Cette version très moderne de Cosi est une révélation. Moderne principalement pour la jeunesse des chanteurs, l'énergie dégagée, la théâtralité et le réel "feeling" entre les interprètes. Et surtout, pour une fois, les récitatifs sont très travaillés, plein d'humour et de verve. C'est, en grande partie, dû au travail de l'accompagnateur au pianoforte, qui rend toutes les scènes délicieuses. Le pianoforte, omniprésent dans les récitatifs comme dans les ensembles, est sûrement responsable de ce regain de vie et de tension ; il est un compagnon tendre, moelleux, qui teinte cet orchestre de chambre de tons vermeils, très italiens ; il est d'ailleurs dosé à la perfection et ne couvre à aucun moment les chanteurs, qui expriment clairement le plaisir qu'ils ont à travailler sous la direction du chef, même si les formats vocaux des participants ne parviennent à égaler les "monstres" de jadis. La principale vertu de cette version, est de rappeler que les opéras sont avant tout, des pièces de théâtre, avec une action, une ironie, un ton, etc., magnifiés par la musique. »
Après ce Così fan tutte très remarqué, René Jacobs a proposé son deuxième volet de la trilogie Da Ponte/Mozart. Le Nozze di Figaro. Le chef belge insuffle une grande nervosité au Concerto Köln. Les instruments d’époque servent une palette inouïe de couleurs qu’une dynamique extraordinaire relaye avantageusement. Les contrastes donnent corps au récit et confèrent un relief enflammé à l’ensemble. Le pianoforte révèle au gré des récitatifs un sens éloquent du discours. L’intérêt de cette parution réside pour l’essentiel dans le traitement engagé de l’ouvrage que propose René Jacobs, attaché comme à l’accoutumée à retrouver l’esprit de l’œuvre et de son époque. Mozart éclate au grand jour et la lecture de René Jacobs est aux antipodes de la récupération bourgeoise qui est parfois faite du petit génie natif de Salzburg. On s’en réjouit !
Dans la continuité de ce qu'il avait réalisé pour Così fan tutte et Le nozze di Figaro, René Jacobs propose de nouvelles clés pour une relecture d'un des opéras les plus célèbres du répertoire... Tout le vernis jauni que le XIXe siècle avait accumulé sur cette histoire intemporelle s'en est allé. Il laisse place aux coloris éclatants de la musique, au mordant des récitatifs, aux contrastes d'une dramaturgie infaillible. Montée dans le cadre du festival d'Innsbruck en août 2006, filmée à Baden-Baden, cette production a reçu de nombreux éloges de la presse internationale. Dans le reportage Looking for Don Giovanni, le réalisateur Nayo Titzin a suivi les créateurs de ce spectacle dans leur recherche d’une certaine vérité musicale.
René Jacobs qui a renouvelé la perception du théâtre mozartien, avec ses lectures de Cosi et des Noces et plus récemment, poursuit ses relectures sur instruments d’époque, dans le style articulé et ciselé qui le distingue désormais. Il manquait à son palmarès, « l’opéra des opéras » : Don Giovanni, deuxième opéra que Mozart compose en complicité avec l’écrivain Da Ponte. L’œuvre maîtresse de la scène lyrique, qui est aussi le volet central de la Trilogie Mozart/da Ponte, fut composé en octobre 1787 pour le Nationaltheater de Prague, avant d’être réadapté pour le Burgtheater de Vienne au printemps 1788.
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