Quel lecteur n’a pas entendu parler d’ « A l’Ouest rien de nouveau » d’Erich Maria Remarque ? Ce roman pacifiste sur la première guerre mondiale reste gravé dans les mémoires?
Nombreux sont les témoignages qui nous relatent de l’expérience des soldats pendant la première guerre mondiale. Chez nous, français, on a les très célèbres Le Feu d’Henri Barbusse ou encore Les croix de bois de Dorgelès et bien d’autres … Chez nos voisins allemands, on connaît surtout A l’ouest rien de nouveau d’Erich Maria Remarque.
Sauf
que l'auteur de ce roman ne s’est pas arrêté là. Il a décidé de nous raconter la
suite, l’après la guerre. Parce qu’il y a eu un après pour ceux qui ont
eu la chance d’en revenir.
source Cherry Livres
Le récit s’ouvre, nous sommes encore dans les tranchées. Les obus fusent et explosent toujours. Les copains sont malades, blessés ou n’en réchappent pas. Et puis soudain, alors qu’on commençait à ne plus y croire après tant de fausses joies, un cri se propage : « La paix ! ». C’est fini. La grande boucherie ferme ses portes. On a du mal à réaliser mais on se met en route. Il est temps de rentrer chez soi. Sur le chemin, on reste sur ses gardes. Le doute persiste. On croise des soldats qui, peu de temps encore auparavant, étaient nos ennemis. On se toise avec méfiance puis on sympathise, on s’échange des souvenirs pour les uns, de la nourriture et des produits de première nécessité pour les autres. Et on arrive enfin chez soi.
Mais l’accueil n’est pas celui qu’on attendait. On espérait retrouver notre vie là où on l’avait arrêtée en partant au front. Faire comme si la guerre n’avait été qu’une parenthèse, que le temps s’était figé et que la vie reprendrait son cours normalement au retour. Mais c’est impossible. Les jeunes adolescents qui étaient partis et qui n’ont que 3-4 ans de plus sont à présent devenus des hommes. Difficile de le faire comprendre à son entourage.
Pour Ernst et ses camarades survivants, le retour se place sous le signe de la déconvenue et de l’incompréhension. Comment accepter de nouveau la futilité du quotidien et de la vie quand on a connu l’horreur et côtoyé la mort d’aussi près ?
On se raccroche à ce qu’on peut. Les études, le travail, l’amour ou la famille. Mais ça ne marche pas. Ajoutons à cela les cauchemars et les hallucinations. Chaque membre du groupe tente de se faire une nouvelle place dans cette société qui, pourtant, ne leur correspond plus. D’autres s’engagent à nouveau dans les rangs de l’armée mais en reviennent écœurés. L’esprit de camaraderie qui régnait pendant la guerre n’est plus. Ils semblent tous être passés à autre chose. Sauf eux.
Dans ce sublime roman d’une cruauté blessante, Erich Maria Remarque brosse le portrait de plusieurs poilus allemands, nous montre leurs difficultés à retrouver une vie normale. On se rend compte que le choc est terrible. Plus rien ne semble avoir de sens. Le fossé entre ceux qui ont combattu et les autres est énorme et apparaît comme infranchissable.
« Il me faut serrer la main de quelques personnes et je commence à suer. Les gens d’ici sont bien différents de ce que nous étions, nous autres au front. En comparaison, j’ai l’air aussi lourd qu’un tank. Ils se tiennent comme s’ils figuraient dans une vitrine de tailleur, et ils conversent comme sur un théâtre. Avec précaution, je cherche à dissimuler mes mains, car la boue des tranchées s’y est incrustée, comme un poison. Je les essuie à mon pantalon à la dérobée. Malgré ces précautions, ma main est toujours moite au moment où je dois la tendre à une dame. »
Le monde qu’ils ont laissé n’est plus le leur au point que l’un d’entre eux retournera sur le champ de bataille s’y donner la mort. La destinée de nombre d’entre eux est tragique. Certains culpabilisent même de rentrer indemne là où les copains sont tombés ou d’autres sont revenus estropiés. Parfois même leur sort leur paraît plus enviable. Car personne ne se soucie de ceux qui sont revenus et leurs proches sont incapables de les comprendre et ne les reconnaissent plus.
Erich Maria Remarque évoque aussi les troubles politiques et sociaux de cet après-guerre douloureux pour l’Allemagne : la défaite, la fuite du Kaiser, les révoltes des soldats qui se sentent trahis et abandonnés, les grappillages de vivres car on a faim.
Roman tragique, d’une force redoutable, Après m’a fortement marquée. Certains passages sont criants de désespoir. Il n’y avait que l’un d’entre ses soldats pour nous expliquer à nous autres qui n’avons pas connu ça ce qu’ils ont vécu et comment, l’impact psychologique que la guerre a eu sur eux, ces réflexes acquis et qui sont devenus naturels.
Après est un roman percutant, bouleversant et surtout indispensable.
Erich Maria Remarque, de son vrai nom Erich Paul Remark, est né le 22 juin 1898 à Osnabrück en Allemagne. Dès la fin de ses études, il est incorporé dans l’armée en 1916, mais il n’est pas volontaire, il est mobilisé. Il est alors envoyé sur le front de l’ouest en juin 1817 mais il est blessé dès la fin juillet par des éclats de grenade. Sa mère meurt d’un cancer en septembre de la même année. En 1918, il est envoyé à l’hôpital militaire de Duisbourg, et en janvier 1919 il est démobilisé. Erich Maria Remarque renonce à toute décoration ou médaille.
Il devient ensuite instituteur en Allemagne mais cette carrière est brève (un an environ). Son premier ouvrage est un échec (La Baraque de Rêve), il effectue alors divers petits emplois.
Dès cette époque, il se fait appeler Erich Maria Remarque (1924) mais on ne sait pas vraiment pourquoi. Il entame alors une carrière de journaliste, et se marie. Mais en 1927, il quitte sa femme et commence l’écriture de son roman "A l’ouest rien de nouveau."
Après un premier refus, on accepte de le publier en 1928 et en janvier 1929 son roman sort en librairie. A cette époque, la presse nationaliste l’accuse d’être juif, en effet selon eux son vrai nom serait Kramer. En 1930, une adaptation cinématographique sort sur les écrans, en avril aux Etat-Unis, et début décembre en Allemagne. Au bout de quelques jours le film est interdit en Allemagne à cause d’émeutes dans les cinémas provoquées par des sympathisants du parti nazi. On suggère alors son nom pour le prix Nobel de la paix. A partir de 1933, il s’exile en Suisse suite à des problèmes avec des membres du parti nazi notamment, et ses livres sont brûlés à Berlin par les nazis. S’en suit alors une période d’exil en Suisse puis aux Etats-Unis. Il poursuit sa carrière d’écrivain, ses romans sont, pour certains, adaptés à l’écran et il se lie avec des acteurs, et notamment avec Marlène Dietrich. Il travaille alors beaucoup pour le cinéma. Il retourne en Europe dans les années 1960 seulement, il mène une brillante fin de carrière et meurt le 25 septembre 1970 en Suisse.
source université de Montpellier
Dans L'Obélisque noir, c'est le chaos de la société allemande saignée à blanc et humiliée par la défaite de la Grande Guerre qui est brossé avec beaucoup de réalisme.
Le narrateur, Louis Bodmer, double à peine voilé de celui qui envoyé au front en 1916 en est revenu blessé et pacifiste convaincu, fait figure d'archétype : jeune soldat de 25 ans qui essaie de se frayer un chemin vers un semblant de normalité, il a renoncé à sa carrière d'enseignant, travaille désormais dans une entreprise de monuments aux morts et, à ses heures perdues, joue de l'orgue dans un asile psychiatrique. Dans le contexte de banqueroute de 1923, où l'inflation " atteinte de phtisie galopante " accule à la faillite les tenants " de l'épargne, de l'honnêteté et de l'honneur ", tous les coups bas et les trafics pour extorquer à la mort le plus de profit possible deviennent aisés. Mais des spéculateurs qui s'étourdissent la nuit dans l'alcool des bordels, aux rentiers, invalides et autres estropiés de l'âme qui tentent de survivre à la misère, la corruption, insidieuse mais irrémédiable, vient abîmer les valeurs comme les sentiments. Chantages, pulsions morbides, commerce tarifé et jouissance sordide de la domination, voilà à quoi se réduisent les rapports entre les hommes dans une époque traumatisée et gangrenée par les germes de " la vérole nationale-socialiste ". De cette dévaluation généralisée, chacun s'en sort alors comme il peut et règle ses comptes avec sa conscience devenue subitement " élastique ". Dans ce tableau historico-social s'exprime une violence brutale et glacée que l'humour souvent sarcastique de l'auteur ne suffit pas à désamorcer.
Dans les années 1930, Robby, un rescapé des tranchées, fait partie d’une joyeuse équipe de fanfarons : ils tiennent en commun un garage, et partagent leur temps entre course de voiture, entretiens de carrosserie, et beuveries générales. Une vraie équipe de copains, une bande sympathique qui cherche dans l’après guerre des raisons de vivre. Jusqu’au jour où une jeune fille fait irruption dans leur vie : Pat. Robby tombe amoureux pour la première fois et nous découvrons avec émotion les émois de ce jeune homme qui ne demande qu’à être touché par l’âme de cette jeune fille.
Entre roman de formation et étude de l’Allemagne d’après guerre, Les Camarades invoque avant tout le bonheur de la fraternité. On y rencontre une faune bigarrée, qui passe du rire aux larmes selon les aléas de la vie : prostituées, patrons de bar, couples en déroute, fonctionnaires précaires, chômeurs… Un roman simple, qui provoque l’agréable nostalgie d’une vie plus simple et plus franche.
A l'ouest rien de nouveau, Livre de poche
Après, Folio
l'Obélisque Noir, Folio
Les camarades, Folio
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