Je suis un garçon
persévérant. En cette rentrée littéraire 2015 sur les six cents romans
inédits annoncés, soit douze années de lecture à raison d'un
roman par semaine, j'en ai choisi quelques uns dont « Le livre
des Baltimore » de Joêl Dicker l'auteur du best seller « La
Vérité sur l'Affaire Harry Quebert. » vendu à plus de trois
millions d'exemplaires, toutes éditions confondues. Pour en avoir discuté avec ma libraire je
n'en avais pas gardé un souvenir extraordinaire. Elle non plus.
Revenons sur les faits :
« À New York, au printemps 2008, Marcus Goldman, jeune
écrivain à succès, est dans la tourmente: il est incapable
d'écrire le nouveau roman qu'il doit remettre à son éditeur d'ici
quelques mois. »
« Le délai est
près d'expirer quand soudain tout bascule pour lui : son ami et
ancien professeur d'université, Harry Quebert, l'un des écrivains
les plus respectés du pays, est rattrapé par son passé et se
retrouve accusé d avoir assassiné, en 1975, Nola Kellergan, une
jeune fille de 15 ans, avec qui il aurait eu une liaison. »
Sur le quatrième
couverture de mon édition de poche, la phrase de Bernard
Pivot m'avait apostrophé : « Si vous mettez le nez dans
ce gros roman, vous êtes fichu. Vous ne pourrez vous empêcher de
courir jusqu’à la six centième page. » Mon édition en
comptait huit cent cinquante quatre. Je me suis dit « merde !
Bernard n'a pas fini le bouquin, avant de comprendre qu'il parlait de
l'édition originale en grand format. Quoi qu'il en soit en
m'attelant à ma lecture, j'ai couru, comme il me l'était demandé.
En bout de course, le livre refermé je me rendis aux vestiaires, enfilais un survêtement et
restais dubitatif. Tout d'abord « Les origines du mal »
ce roman dans le roman considéré comme un chef d’œuvre de la
littérature américaine avec des envolées lyriques telles que :
« « Ma tendre chérie, vous ne devez jamais mourir. Vous
êtes un ange. Les anges ne meurent jamais. Voyez comme je ne suis
jamais loin de vous. Séchez vos larmes, je vous en supplie ».
Heureusement que William Styron, l'auteur du Choix de Sophie et de La
Proie des flammes, n'était plus de ce monde pour lire pareilles
fadaises. Et moi de reprendre quitte à frôler le Nobel :
« Nola, je t'aime, tu m'aimes mais notre amour est impossible.»
avant de découvrir plus loin que Nola est habitée par sa mère et
de pointer un crucifix sur mon exemplaire en hurlant « Louisa,
bordel de merde sort du corps de Nola et qu'on en finisse ! ».
Tandis que nos académiciens rêvait au fil des pages à une
relation buccale avec Nola, spécialiste du genre, au même titre que
les jurés du Goncourt des lycéens ils octroyaient à ce roman parfois
indigeste et souvent laborieux deux prestigieux prix littéraires.
Je sais, je suis très
sévère avec ce roman qui a conquit un très large public ce qui est loin d'être le cas
pour bon nombre d'écrivains, mais comme le dit Harry à Marcus
« …écrire c'est comme boxer, mais c'est aussi comme courir
(…) si vous avez la force morale d'accomplir les longues courses,
sous la pluie, dans le froid, si vous avez la force de continuer
jusqu'au bout, d'y mettre toutes, tut votre cœur, et d'arriver à
votre but, alors vous serez capable d'écrire. Ne laissez jamais la
fatigue ni la peur vous en empêcher. »
Alors, j'avais couru
d'une foulée souple avant de connaître quelques difficultés
respiratoires et un début de point de coté en arrivant notamment à
la page sept cent quatre vingt cinq où, comme Lansdane, le chef de
la police d'état, je m'exclamais : « Perry...on ne peut
plus continuer. (…) D'abord c'était Quebert, après Caleb,
maintenant le père, ou le Bon Dieu. » A ce stade de l'enquête
après bien des révélations, manipulations, fausses pistes et coups
de théâtre j'étais comme lui. J'ai posé mon dossard sur le bureau
question de reprendre mon souffle, et jeté l'éponge avant le gong
final.
Joêl Dicker, La Vérité sur l'Affaire Harry Quebert, De Fallois Poche.
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