dimanche 6 décembre 2020

Hommage à Adrienne Monnier (1892-1955)

 

                                                             Adrienne Monnier
 

   En plein combat autour de la réouverture des librairies, la Ville de Paris s’apprête à rendre hommage à une figure mythique de ce métier, Adrienne Monnier (1892-1955) par la pose d’une plaque à sa mémoire sur la façade du 7, rue de l’Odéon (6e arrondissement), à l’emplacement de son ancienne boutique.

 

                                                                  La librairie des Amis du livre 7 rue de l'Odéon.
 

  Adrienne Monnier fut une des grandes libraires de l'entre-deux guerres, fervent soutien des plus grands écrivains, alors bien souvent ignorés ou méconnus.


  La librairie ouvre le 15 novembre 1915 : « Notre première idée était très modeste : nous ne cherchions qu'à mettre sur pied une librairie et un cabinet de lecture dévoués surtout aux œuvres modernes ». Adrienne Monnier, qui a découvert la littérature contemporaine avec Le Mercure de France, souhaite présenter avant tout cette production. La librairie deviendra vite le lieu de rencontre des écrivains : Paul Fort, Pascal Pia, Jules Romains, Léon-Paul Fargue, Louis Aragon, André Breton, puis André Gide, Paul Valéry, André Salmon, Max Jacob, Pierre Reverdy, Blaise Cendrars, Jean Paulhan, Tristan Tzara, Jean Cassou font partie des premiers « abonnés ». Apollinaire, de retour du Front en 1916, « interpelle Adrienne : c'est tout de même fort qu'il n'y ait pas un seul livre de combattant dans cette vitrine ! ». Valéry Larbaud « entre en scène » en 1919, puis Claudel, Gallimard, et en 1920, James Joyce, dont Sylvia Beach, qui avait ouvert Shakespeare et Cie en 1919, venait de publier Ulysse.

  Loin de se contenter de vendre ou de prêter des livres, Adrienne Monnier va faire de sa librairie l'un des lieux majeurs de la création littéraire de l'entre-deux-guerres : rencontres autour de textes et de débats, chacun y lisant ses écrits ou commentant ceux des autres, conférences, mais aussi activités éditoriales : après la « mésaventure de Commerce », Adrienne Monnier fonde Le Navire d'Argent en 1925, Mesures en 1932, et publie nombre d'œuvres de ses amis : elle éditera ainsi Jules Romains, Paul Fort, Paul Claudel, Georges Duhamel, Georges Chennevière, Luc Durtain, Valéry Larbaud, Paul Valéry, ses propres poèmes et, bien sûr et avant tout, l'œuvre qui tue ses traducteurs : Ulysse, publié en francais par La Maison des amis des livres en 1929 et tiré à 1 200 exemplaires.

  Multiples activités qui ne furent pas de tout repos et mirent parfois la librairie elle-même en péril : en 1926, Adrienne Monnier est contrainte de vendre sa propre bibliothèque pour éponger les dettes du Navire d'Argent. Elle qui avait aidé nombre de réfugiés antinazis réussira à faire de sa librairie un des lieux restés respirables pendant la guerre et « fêtera » en mars 1941 ses 25 ans d'existence. Une existence qui se prolongera jusqu'en 1951. Adrienne Monnier choisira de mettre fin à ses jours en 1955.

   Au 12 rue de l'Odéon, en face de celui d'Adrienne se tenait la librairie Shakespeare and Cie de Sylvia Beach. Avec le Théâtre de l'Odéon à proximité, un magasin de musique et les deux librairies, Adrienne avait surnommé leur petit quartier "Odeonia" et Sylvia louait des chambres au-dessus de sa boutique. Elle vivait avec Adrienne au quatrième étage côté rue.

   Paris hébergeait une communauté d'écrivains dynamiques et de lecteurs avides. C'était une période très excitante pour les libraires et une époque glorieuse pour la littérature. Les revues littéraires étaient florissantes et des écrivains comme T.S Elliot, James Joyce, F. Scott Fitzgerald, Ezra Pound,D.H Lawrence ou Hemingway trouvaient de nouveaux publics. Adrienne, en fait, était aussi rédacteur en chef et éditeur de son propre magazine, Navire d Argent, qui présentait la littérature anglaise aux lecteurs français, y compris les écrivains comme Ernest Hemingway.

 

 

La librairie Shakespeare and Cie actuellement
37 Rue de la Bûcherie, 75005 Paris


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