vendredi 1 mars 2013

Jeu set et match


J’ai regardé l’ombre du cerisier trembler et la pelouse frémir sous le souffle léger d'un vent d’été. J’étais prêt à affronter le néant. Une voiture s’est garée devant la baraque. J’ai subodoré que rien ne se déroulerait tel que je l’avais souhaité. Il ne passe jamais personne. Lorsqu’une voiture se gare devant la baraque, fatalement c’est pour moi. J’ai essuyé une larme d’un pouce tremblant et suis sorti accueillir comme il se doit mes visiteurs. Une brute et sa femme. Quand je dis une brute, je m’avançais peut-être un peu. J’ai jugé cela à sa carrure et ses vêtements de chasse. Sa femme était en chaise roulante. J’ai crains le pire. La brute m’a ’écrasé la pogne et ouvert le coffre de sa bagnole. Le haut débit venait d’arrivée en Creuse. Et pas n’importe lequel. Une tronçonneuse rutilante de graisse prête à dézinguer la forêt de Sherwood. J’ai balancé mon livre au feu et, la brute et moi, nous sommes rendus derechef sur le théâtre des opérations. Pas le temps de dire ouf que les arbres autour de moi se mirent à tomber. Et de courir pour ne pas être écrasé par les troncs. Une bonne douzaine de troncs plus tard, la brute s’est lassée. Il était joueur mais avait ses limites. Il a décrété que nous allions faire une corde de bois. Pour ma part je me serais contenté d’un petit bout de ficelle. Nous n’allions pas nous fâcher pour si peu. Il a débité un grand jeu de Mikado géant. Nous nous sommes bien entendu sur ce coup là. Il acheminait la brouette, pleine de gros rondins à débiter avant d’être remisés dans le hangar à bois, et je la ramenais vide. Je n’allais tout de même pas lui laisser tout faire. J’ai eu droit à un repas chaud et fait l’économie d’une sieste. Puis la brute s’est attaquée à la hache aux morceaux de troncs. Clair, net et précis. Un coup de hache, le fendait en deux. Deux autres coups et en quatre. J’ai laissé faire. On ne contrarie pas un type au coup de hache aussi précis et puissant. Un ancien bourreau, sans doute. Jai été terrassé en trois sets sur mon petit Wimbledon à trimballer mes bouts de bois sans possibilité de se fourrer à l’ombre. Un Wimbledon avec des taupinières mais Wimbledon tout de même. A l’issue du match, toujours aussi gaillard, la brute m’a rentré aux vestiaires dans la brouette. Jeu, set et match.

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